" Nous garderons notre première position d’exportateur de composants automobile vers l’Europe "
dit Fathi Sahlaoui, DG des Industries manufacturières
la Tunisie est décidée à développer l’industrie automobile, qu’elle soit conventionnelle ou tournée vers l’avenir. Nous tenons à garder notre position de premier exportateur des composants automobiles vers l’Europe.
Dans un monde en mouvement continuel où la concurrence est ardue, la Tunisie est bien positionnée sur le marché des composants automobiles. L’industrie automobile maintient son premier rang à l’export. A l’international, la Tunisie reste bien positionnée d’autant plus que le secteur connaît une refonte de sa chaîne de valeur avec un basculement de la demande et de l’offre mondiale vers les pays émergents. De grands constructeurs automobiles augmentent leurs capacités de production en procédant à des extensions ou en réalisant de nouvelles usines.
WMC : Le point sur l’industrie automobile dans notre pays ?
Fathi Sahlaoui : La Tunisie est le deuxième exportateur des composants automobiles, essentiellement en direction de l’Europe, avec plus de 270 entreprises opérant sur le marché et avec des sociétés leaders dans le secteur des faisceaux de câbles.
A mon humble avis, nous sommes les premiers si nous focalisons uniquement sur les composants. Cette industrie est considérée comme prioritaire et bénéficie de nombre d’avantages et d’incitations en termes de primes d’investissement et autres privilèges.
Au cours de la dernière décennie, la production et l’exportation dans l’industrie automobile en Tunisie ont réalisé une croissance annuelle à deux chiffres, soit une moyenne de 12%. Le tissu industriel est marqué par la présence de constructeurs automobiles de renommée internationale comme Leoni, Kromberg & Schubert, Yazaki, Valeo, Dräxlmaier, Schlumberger, soit des locomotives du secteur disposant de grandes capacités d’emploi et d’exportation. Ces firmes suivent un rythme de croissance soutenu et évolutif grâce aux extensions qu’elles opèrent annuellement. Je nomme à titre d’exemple Yazaki et Leoni.
Combien de postes ont été créés cette année suite aux dernières extensions réalisées par les firmes que vous venez de citer ?
Nous parlons au moins de 10.000 emplois à créer par Yazaki et Leoni d’ici la fin de l’année 2019. Leoni a inauguré un site en 2018 et il y a un autre qui entrera en production cette année.
Les composants sont un pilier de l’industrie automobile et représentent un socle fondamental pour développer
l’industrie de l’assemblage des voitures. Si les industriels disposent d’un tissu développé en matière de composants -et je parle là des équipementiers de rang 1 et de rang 5-, ils pourront implanter leurs sites de montage en Tunisie. Ce qui nous manque, à titre d’exemple, ce sont les équipementiers qui fabriquent le tableau de bord des véhicules.
Où se situe la Tunisie dans la chaîne de valeurs de l’industrie automobile ?
Actuellement, nous avons tous les rangs, ils s’installent là où il y a des usines de montage et d’assemblage.
En avons-nous ici en Tunisie ?
Oui, il y a la marque tunisienne de voiture Wallys Car qui assure la fabrication de bout en bout. Tout récemment on a eu la marque Geely, représentée par le Groupe Zouari, seul véhicule particulier assemblé en Tunisie dans les usines de la société Médicars. La Dongfeng S50 montée localement dans les usines de COMET à El Mghira.
Nous avons également des sites de montage de pickup tels l’Isuzu assemblé par la Société des industries mécaniques maghrébines de Kairouan, ainsi que Médicars à Sousse qui assure l’assemblage des Pickup Mahendra avec un taux d’intégration conséquent.
Il y a une année, c’est Peugeot qui s’est engagée sur le chemin de l’assemblage des pickups en s’implantant à El Mghira avec une capacité de 4000 véhicules par an. Il est prévu d’ailleurs que sa capacité passe au double.
Le ministère a-t-il mis en place une stratégie pour attirer de nouveaux investisseurs ?
Le 7 juillet 2018, nous avons proposé au gouvernement un plan pour développer le secteur et promouvoir le site Tunisie. Nombre de mesures ont été prises dans le cadre d’un conseil ministériel consacré à cette industrie. Nous comptons lancer l’automotive smart city à el Sbhikha. Il s’agit d’un écosystème de 250 hectares réparti entre une cité industrielle de 200 hectares et 50 hectares en tant que cité d’appui abritant un centre de Recherche et Développement, un centre de formation professionnelle PPP -à l’instar de celui d’El Mghira- et une zone logistique. C’est une proposition que nous comptons traduire en actions concrètes.
Le monde se tourne vers le futur, on parle d’économie verte, d’industrie verte et bien entendu de transport vert. Comment expliquer le retard de la Tunisie à ce niveau, d’autant plus que certains opérateurs privés pensent y investir ?
Il y a tout un projet d’introduction de véhicules électrique en Tunisie. J’ai été moi-même chargé du dossier en question. Un opérateur privé en a récemment fait la démonstration à travers un véhicule électrique. C’était une action pilote qui vise à terme à importer des milliers de véhicule électriques.
En avons-nous les moyens aujourd’hui et tout de suite ? Ces voitures, pour votre gouverne, nécessitent des temps de recharge d'environ huit heures et par conséquent leur généralisation implique le développement d'équipements collectifs analogues pour la recharge. Ces voitures ont besoin de bornes de recharges -et d’ores et déjà il y a un projet pour une convention entre la STEG et la SNDP pour installer des bornes dans les stations AGIL. Il y a tout un volet stratégique à mettre en place et si nous devons encourager l’usage de ces voiture et nous voudrions en outre qu’il y ait un développement de tout un tissu industriel autour.
Nous devons aussi procéder à des comparaisons entre les coûts et les avantages des voitures conventionnelles et ces nouveaux véhicules, et c’est l’ANME (Agence nationale de maîtrise de l’énergie) qui en est chargée.
Donc pour résumer, nous estimons qu’il faut commencer par introduire entre 500 et 1000 véhicules électriques dans un premier temps. Pour les subventionner, nous pourrions recourir au Fonds de transition énergétique. Des propositions allant dans ce sens seront soumises à un conseil ministériel. En fait, la Tunisie est décidée à développer l’industrie automobile, qu’elle soit conventionnelle ou tournée vers l’avenir. Nous tenons à garder notre position de premier exportateur des composants automobiles vers l’Europe