Le Temps

Après son raté monumental, le Secret Service en ligne de mire

- LÉO TICHELLI, TUCSON @TichelliL COLLABORAT­ION: SIMON PETITE, MILWAUKEE

POLÉMIQUE L’agence dédiée à la protection des (ex-)présidents et de leur famille – y compris les candidats à la présidenti­elle – a été pointée du doigt après sa gestion catastroph­ique du meeting de Donald Trump samedi. Une enquête a été ouverte pour déterminer les causes de cette débâcle

XPlusieurs blessés graves, un mort et un ex-président qui réchappe miraculeus­ement à un tir de fusil d’assaut. C’est le bilan catastroph­ique du Secret Service américain, chargé de la protection de Donald Trump et de la sécurité lors du meeting de samedi à Butler, en Pennsylvan­ie. Lundi, la directrice du service, Kimberly Cheatle, a fait son mea-culpa, déclarant qu’elle tenait «à présenter [ses] plus sincères condoléanc­es à la famille et aux amis de Corey Comperator­e, […] ainsi qu’aux personnes qui ont été blessées lors de cet acte de violence insensé».

De nombreuses failles identifiée­s

La réaction tardive et la sécurisati­on plus que défaillant­e des lieux sont largement reprochées à l’agence gouverneme­ntale, qui a subi une vague de critiques, provenant pour la majorité des soutiens à Donald Trump. A tel point que certains médias ont publié des articles de «fact checking» afin de démystifie­r l’avalanche de théories du complot, émanant tant des démocrates que des républicai­ns, et démêler le vrai du faux à propos de la gestion de cet événement. Trois jours après le drame, une question est sur toutes les lèvres et reste pour le moment non résolue: comment est-ce possible qu’un tireur ait pu grimper sur un bâtiment situé à environ 135 mètres de l’estrade sur laquelle se tenait le candidat républicai­n?

Le hangar sur lequel s’est hissé et d’où a tiré Thomas Matthew Crooks n’a pas été inclus dans le périmètre de sécurité, et ce, sans raison apparente pour le moment. Tous les experts interrogés par les médias ces trois derniers jours sont cependant formels: il est incompréhe­nsible qu’un lieu en hauteur si proche de Donald Trump ait pu servir de perchoir pour un tireur. Surtout, ce toit avait été identifié par le Secret Service comme une potentiell­e menace à la sécurité de l’événement avant même le début du meeting, révélait la chaîne NBC dimanche. Aussi, la police locale, avec laquelle travaille conjointem­ent l’agence, avait averti cette dernière qu’un homme suspect se trouvait à proximité, toujours selon NBC.

Autant de révélation­s qui placent le Secret Service en position plus que délicate et ce, alors qu’a lieu en ce moment même à Milwaukee dans le Wisconsin la convention républicai­ne, à laquelle participe Donald Trump.

Alejandro Mayorkas, qui a autorité sur l’agence, a déclaré sans ambages que la sécurité lors de ce meeting était un «échec»

Alejandro Mayorkas, secrétaire à la Sécurité intérieure des EtatsUnis, qui a autorité sur l’agence, s’est rapidement exprimé sur le sujet, déclarant sans ambages que la sécurité lors de ce meeting était un «échec». Pour autant, il a également annoncé faire «confiance à 100%» à l’agence et à sa directrice pour mener à bien l’enquête devant déterminer les manquement­s qui ont pu provoquer ce drame. La commission de la Sécurité intérieure et des Affaires gouverneme­ntales a également interpellé lundi Alejandro Mayorkas, lui demandant «que les représenta­nts appropriés de [ses] départemen­ts, y compris le Secret Service américain, fassent un exposé aux membres de la commission sur les défaillanc­es de sécurité qui ont permis à cet incident alarmant de se produire».

Kimberly Cheatle a quant à elle communiqué que son agence allait collaborer «avec toutes les agences fédérales, étatiques et locales concernées pour comprendre ce qui s’est passé, comment cela s’est passé et comment nous pouvons empêcher qu’un tel incident ne se reproduise». Elle a aussi tenté de répondre aux craintes concernant la tenue de la convention républicai­ne, assurant que ses équipes avaient «revu et renforcé» le plan de sécurité.

En outre, Donald Trump a déclaré sur son réseau Truth Social qu’il est «impératif que Robert F. Kennedy Jr. [lui aussi candidat à la présidenti­elle, ndlr] bénéficie d’une protection du Secret Service – immédiatem­ent. Compte tenu de l’histoire de la famille Kennedy, c’est la meilleure chose à faire!» C’est désormais chose faite, après une demande en urgence de Joe Biden à son secrétaire à la Sécurité intérieure.

Une convention républicai­ne sous haute tension

Pour rappel, l’agence est chargée de protéger les principaux candidats à l’élection présidenti­elle ainsi qu’à la vice-présidence et ce durant les 120 jours qui la précèdent (sauf si le ou la candidate décline la protection). Elle est également chargée de garantir la sécurité du président, du vice-président et de leur famille immédiate, celle des ex-présidents, de leurs conjoints et de leurs enfants jusqu’à leurs 16 ans. Les compétence­s du Secret Service ne sont cependant pas gravées dans le marbre et, pas plus tard qu’en avril de cette année, certains démocrates de la Chambre des représenta­nts ont voulu faire passer une mesure redéfiniss­ant qui serait éligible pour être protégé par l’agence. Un texte, intitulé «loi sur le refus de la sécurité infinie et des ressources gouverneme­ntales allouées aux anciens protégés condamnés et extrêmemen­t déshonoran­ts», directemen­t dirigé contre Donald Trump, et que certains élus républicai­ns n’ont pas manqué de rappeler après la débâcle de samedi.

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