Voulons-nous une magnifique étiquette sur une bouteille vide ?
Les propos de M. Dettling, le nouveau président de l’UDC (LT du 25.03.2024) démontrent qu’il suit effectivement au millimètre près la ligne de M. Blocher en matière européenne. La stratégie de l’UDC concernant l’UE revient à apeurer les citoyens et à sciemment créer de la confusion entre l’adhésion et les accords bilatéraux. M. Blocher n’évoquait-il pas, dans une interview aussi parue dans Le Temps (31.10.2023) un «contrat-cadre pour entrer dans l’UE», alors même que les accords bilatéraux visent précisément à éviter de devoir adhérer à l’UE.
Demander, comme l’UDC, une double majorité du peuple et des cantons pour le prochain traité entre la Suisse et l’UE revient à faire croire que la Suisse va adhérer à l’UE: n’est-ce pas une tromperie?
Il est un peu facile d’ironiser sur les «bureaucrates européens» sans être concret. Si leur travail était de mauvaise qualité, un parti politique suisse au moins critiquerait ledit travail et donnerait des exemples précis.
M. Dettling sous-entend que le système démocratique suisse est supérieur aux autres systèmes démocratiques, puisque c’est le peuple qui décide:
- Il est exact qu’en Suisse, le peuple a souvent le dernier mot; mais pas toujours! Ainsi, dans les cas où la double majorité est requise, le peuple peut devoir s’incliner devant la majorité des cantons (on a pu le constater en novembre 2020).
- Il est temps que tous les Suisses réalisent qu’il existe plusieurs types de démocraties. Ainsi, les pays de l’UE, aussi bien les monarchies constitutionnelles que les républiques, sont des démocraties. En toute hypothèse, à la différence d’une Suisse entretenant actuellement des liens ténus avec l’UE, ces pays ne se contentent pas d’entériner des décisions prises sans qu’ils aient eu leur mot à dire, ou d’«acheter» leur participation aux programmes de l’UE.
Pour prendre une image viticole, les opposants à l’UE agissent comme s’ils considéraient que l’étiquette des bouteilles était plus importante que leur contenu.
A quoi cela sert-il de faire figurer le mot «souverain» sur l’étiquette d’une bouteille qui se vide? Il est temps que le Conseil fédéral se fasse entendre sur la question et ne laisse pas le monopole de la parole aux adversaires de tout nouvel accord avec l’UE. ▅