Avec Perler, c’est comme avec Fischer: les copains d’abord
C ’était une hypothèse, nous en avons la preuve: la ville de Genève rayonne jusqu’à Paris. Voyez comment d’exceptionnels talents de la Ville Lumière, sans équivalents dans la modeste Cité de Calvin, se ruent pour y décrocher des postes! La codirectrice du département de l’écologiste Frédérique Perler a en effet embauché sa demisoeur, puis une connaissance parisienne comme urbaniste, enfin le petit ami de celle-ci en tant qu’adjoint de direction, révèlent la Tribune de Genève et Léman Bleu depuis quinze jours.
Au département de la conseillère administrative Perler, on file les clés de la «maison Genève» à la famille et aux amis français de la famille avec méthode et application. Il faut croire que l’engagement de top guns est au coeur de la stratégie de recrutement, en dépit des règlements municipaux, du sens commun, ou du préavis négatif des ressources humaines – le copain de l’urbaniste ayant même été dépassé au score par une candidate genevoise écartée à son profit.
Un règlement interdit tout engagement au-delà de Lausanne et de Bonneville en France? Pas grave, puisqu’une astuce a été mise au point: une boîte aux lettres d’une ferme sise à Genolier (VD), dont le propriétaire n’est autre que le beau-père de la codirectrice francophile, permet aux Parisiens de passage d’annoncer cette adresse pour entrer dans la zone de domiciliation. Les clés de l’embauche, donc. Ce domicile fictif a d’ailleurs déjà rendu service en 2019 à la codirectrice elle-même, domiciliée à Yverdon. Une fois le poste obtenu, elle est retournée y vivre, non sans avoir obtenu une dérogation. Tant il est vrai que diriger le Département de l’aménagement, des constructions et de la mobilité de la ville de Genève depuis Yverdon offre un recul salutaire. Il suffit de sauter dans le train à Cornavin pour oublier le trafic trépidant, les réaménagements qui tournent mal, les arbres à problème, les actions de dégrappage du bitume au marteau-piqueur. Une affaire rocambolesque dont Frédérique Perler avait réchappé par miracle.
Cette fois, c’est autre chose. La République voit rouge devant l’incurie de la Verte. Vraisemblablement captive de son administration, suppute-t-on, elle se révèle aussi pusillanime. Après avoir tricoté une périphrase censée l’exonérer de sa responsabilité politique, elle s’est murée dans le silence. Sans même avoir le bon goût de remercier la codirectrice. Ce faisant, elle prend les Genevois pour plus niais qu’ils ne sont. Car ces petits arrangements entre amis ne sont pas de l’ordre de la bourde administrative, mais de l’affaire politique.
Il se trouve pas mal de gens, dans la République, qui n’ont pas besoin des clés de la ferme de Genolier pour prétendre à un joli poste. D’autres qui galèrent à trouver un travail, n’étant pas membres de la petite coterie d’élus et de fonctionnaires de gauche habitués à se nourrir à la mamelle de l’Etat. Qui y voit une similitude avec l’affaire Fischer fait preuve de mauvaise foi. Quant aux contribuables, ils découvrent qu’ils paient des hauts fonctionnaires venus de France et de Navarre. Je vois d’ici les rires jubilatoires des anti-européens UDC et MCG qui trouvent là matière à conquête.
Si les Genevois avaient encore des illusions sur l’envergure de Frédérique Perler, les voilà fixés. Qui n’assume pas n’a pas l’étoffe. Quand les élus doués de sens politique auraient agi afin de sauver la confiance dans les institutions, les apparatchiks se contentent d’esquiver pour se maintenir dans l’appareil. C’est regrettable, puisque toute la classe politique s’en trouve discréditée.
Au vu de ce qui précède, je ne saurais trop recommander à Frédérique Perler de retrouver sa vie d’avant, particulièrement riche sur le plan associatif. Elle était notamment membre du comité La Boîte à boulots. Nul doute qu’elle a étoffé ses compétences en la matière depuis. ■
La République voit rouge devant l’incurie de la Verte