Playboy (France)

“Dans certains studios, une épingle qui tombe et c’est le drame !”

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acheteurs. Je leur ai expliqué mon concept, mes produits, ça a duré deux ans. Je n’ai pas perdu d’argent, ce qui était tout de même un petit exploit. Mais je me suis dit qu’au final, je n’étais pas prêt, j’avais besoin de temps et, surtout, d’expérience. Je suis donc allé chez Givenchy en tant qu’assistant studio, une expérience très enrichissa­nte car je touchais à tout, de la création à la collection jusqu’au casting. A l’époque, Givenchy était un petit studio comparé à aujourd’hui, l’idéal pour apprendre et se former. Ensuite, j’ai fait un an chez Marc Jacobs pour un côté plus internatio­nal et, enfin, je me suis dit que j’étais prêt. J’ai monté un dossier, j’ai convaincu les fabricants avec qui je travaillai­s. J’ai réuni deux personnes en janvier 2011 autour de moi pour distribuer en direct la marque, monter la collection. On était passionné, excité ! rien ne nous arrêtait.

Pourquoi cette envie de monter sa propre marque ?

Parce que j’avais envie de créer mon petit univers, mon monde à moi. Je suis quelqu’un simple et optimiste, j’adore rire. Au studio, on met de la musique toute la journée, on rigole. Je voulais ça car je sentais que dans plusieurs studios par lesquels j’étais passé, tout le monde était tendu. Une épingle qui tombe et c’est le drame! En plus, je trouvais qu’il n’y avait pas vraiment d’entre-deux entre une marque de luxe et une marque bas de gamme pour des produits classiques mais intelligen­ts.

Vous vous inspirez beaucoup des personnes qui vous entourent. Pensez-vous que le fait d’être ancré dans la réalité est votre principale force ?

Oui. Je demande à mes amis quelles sont les pièces qu’ils ont envie de porter. Je regarde les hommes dans la rue. Puis je tente. il y a deux ans, j’ai tenté un manteau à paillettes… On m’aurait dit des années avant que je ferais ça, j’aurais rigolé. Ma mode est une mode intuitive. Si ça ne fonctionne pas, ce n’est pas grave, je me suis fait plaisir. C’est ça, la vie : la diversité et le changement.

Cette mode démocratiq­ue passe-t-elle par cette impression de déjà-vu que l’on ressent dans une majorité de vos pièces ?

Oui, c’est exactement ça. Je commence à créer en partant toujours d’une pièce basique. J’adore l’impression de déjà-vu car je trouve qu’il y a quelque chose de très réconforta­nt. Mon objectif, c’est qu’un homme qui entre dans une cabine d’essayage et qui enfile un vêtement ressorte heureux et plein de confiance. Cela ne veut pas dire que je ne m’autorise pas quelques “twists” qui n’ont l’air de rien mais qui font tout : une épaule un peu tombante sur un manteau, un ourlet plus court d’un pantalon…

Dans votre dernière collection printempsé­té 2018, vous rendez hommage à Paris et ses quartiers, pourquoi ?

Parce que j’adore Paris, son énergie, sa diversité en fonction des quartiers. Je me suis mis dans la peau d’un touriste qui débarque et se laisse émerveille­r par la ville. Le bleu des tuyaux de Beaubourg, le jaune des fruits d’été des étals de Strasbourg-SaintDenis, tout ce qui rend la ville éclectique et excitante. J’ai retranscri­t mes impression­s dans mes vêtements : des bermudas, des sandales portées avec des chaussette­s, des chemises manches courtes. Pendant le défilé, les mannequins avaient des appareils photo jetables, on avait envie de joie et de rire avec une multitude de couleurs.

Vous avez imposé un style élégant et en apparence classique, au contraire de jeunes marques qui vont chercher le buzz pour se faire connaître. Etes-vous un créateur anti-buzz ?

Oui je ne le cherche pas du tout. Avec AMi, on ne s’approche jamais des influenceu­rs, des stars, ou alors il faut que la relation se fasse naturellem­ent. Quand je prête des vêtements à Christine and the Queens, il y a une rencontre, on échange et on apprend à se connaître. Je ne cherche pas à multiplier les collaborat­ions pour briller, je trouve que notre rythme est parfait. On était pour l’instant à deux collection­s par an, on

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