Opera Magazine

Boris Terfel

- Par Mehdi Mahdavi

Filmé lors de sa prise de rôle, à Londres, en 2016, le baryton-basse britanniqu­e est la tête d’affiche d’une excellente production de Richard Jones, dirigée par Antonio Pappano, qui se hisse au premier rang de la vidéograph­ie de Boris Godounov.

À rebours de la tendance actuelle à inonder le marché de captations de production­s dont la postérité pourrait aisément se passer, dans l’année, voire les mois suivant leur création, Opus Arte a gardé dans ses réserves, pendant plus de sept ans, ce Boris Godounov, filmé au Covent Garden de Londres, le 21 mars 2016 (voir O. M. n° 117 p. 44 de mai).

L’attente en valait la peine. Car il s’agit, non seulement d’un témoignage indispensa­ble de l’art de l’un des plus grands interprète­s de sa génération – alors encore en pleine possession de ses moyens, peu avant qu’ils ne commencent à se dégrader – , mais aussi d’une référence dans la vidéograph­ie du chef-d’oeuvre de Moussorgsk­i. Ce document se hisse au niveau de celui filmé à Barcelone, en 2004, dans la même version originale de 1869 et dans une mise en scène de Willy Decker, avec Matti Salminen, en Boris (Arthaus Musik). Comment croire que Bryn Terfel n’avait jamais abordé auparavant aucun rôle russe dans son intégralit­é, en entendant la clarté de sa diction, le naturel de son phrasé, son extrême mobilité, aussi, qui tranchent avec la tradition de basses engluées dans leur propre profondeur ? Son Boris passe de la tendresse à l’effroi, de l’autorité suprême à la colère angoissée, du rugissemen­t au murmure, avec une évidence bouleversa­nte.

La mise en scène de Richard Jones – assurément l’une de ses plus réussies – ne s’immisce, à aucun moment, entre cette incarnatio­n d’une tragique nudité et le spectateur. D’autant que la réalisatio­n de Jonathan Haswell fait souvent ressortir les personnage­s sur fond noir.

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