Un vent de suroît
Il est rare, pour ne pas dire unique, qu’un club incarne à ce point son territoire, et même son grand territoire. C’est la rançon d’un certain isolement, sur la carte du rugby français : Vannes, club d’une ville, d’un port, de leurs remparts et patrimoine médiéval, est aussi le club d’une région tout entière, la Bretagne. Une sorte de club-province, en fait, comme le pratique… toute nation celte qui se respecte !
De cette belle et fascinante Bretagne, aux habits de jade et de bout du monde, le RCV fut dès 2016 le premier représentant dans le monde professionnel ; on le sait depuis samedi soir, il en sera à jamais le premier étendard en élite. C’est historique, ce que l’on vit. À ne surtout pas minorer.
Vannes qui rejoint le Top 14, c’est le traceur d’un rugby français qui évolue et s’ouvre à d’autres mondes, d’autres publics et d’autres territoires. Un vent de frais et de modernité sur notre vieux sport en quête perpétuelle d’expansion, et qui trouve dans cette issue sportive une aubaine de croissance. Un vent de suroît (comprenez « sud-ouest ») qui va souffler sur la Bretagne, emportant dans ses embruns un de ses fleurons identitaires : son sport fétiche.
Vannes en Top 14, c’est l’attrait de la découverte. Celle d’un stade, d’un peuple et d’un savoir-être. Mayol, Michelin, Dauger, Giral et Deflandre étaient des pèlerinages ? Bientôt, il faudra compter La Rabine à la liste, soyezen sûrs. Il y aura l’envie d’y encourager son équipe mais aussi cet attrait d’exotisme, la curiosité de découvrir cette ferveur immense et bienveillante. La bonne humeur dont les supporters vannetais ont inondé ErnestWallon, ce samedi, ouvre l’appétit.
Il faudra désormais aller à Vannes pour voir, entendre et sentir comment le rugby se vit ici, à la bretonne, dans cette quête sans fin de convivialité. Ce territoire s’en revendique et c’est heureux : cela va si bien à notre sport ! Ce sera, le temps d’un week-end, un contrepoids bienvenu, comme un pansement d’Aloe vera sur les récentes dérives, déplorées et condamnées, dans les rangs de Perpignan et d’ailleurs.
Vannes en Top 14, ce seront des matchs, à l’intensité décuplée et face à laquelle il faudra encore s’élever. Ce sera dur ? Bien sûr, et sans rien d’autre à penser qu’un maintien qui ferait déjà le trésor de tous. Le monde professionnel, s’il embrasse avec joie ses alentours festifs, garde en priorité la quête de performance et, à ce jeu, la pitié n’existe jamais pour la concurrence. Trop dur ? On verra, et ces Vannetais auront l’opportunité de prouver le contraire. Pour l’heure, l’important est ailleurs. Il est dans cette immédiateté des célébrations, de cette communion avec un peuple breton qui ouvre son coeur et ses bras à un nouveau sport. Tout cela, c’est à Vannes qu’on le doit. Alors, bienvenue en Top 14. Et bon vent.