Et si on baissait le SMIC ?
Ce qui est cher est rare ! C’est une évidence. Le prix limite en nombre l’accès aux produits et services… accessibles aux seules personnes qualifiées de “riches”, des gens ayant les moyens, comme on dit.
Une agence de pub a développé une campagne sur ce thème, en montrant qu’une tranche de jambon, que chacun considère encore aujourd’hui comme accessible aux plus démunis, s’apparenterait à un achat de luxe. Si cette métaphore peut caricaturer un avenir économique en mode “décroissance”, stigmatisant un pouvoir d’achat en perpétuel déclin, contrairement à l’inflation, elle induit aussi, en second niveau, la prescience d’un avenir où les présumés “riches” deviendraient l’exception.
Moins de “riches” ? La première solution pour contrôler “les riches” serait d’abaisser le seuil d’accès à la qualification de “riche” à 400.000 euros et plus par an, et d’en multiplier le nombre. Une première dévaluation du statut de “riche”… qui serait suivie d’autres, sans quoi, qui pourrait-on taxer ? Et quand bien même on nivellerait radicalement le seuil de richesse, est-ce que les smicards du futur deviendraient riches pour autant ?
Si l’on baissait le SMIC, les moins riches des riches seraient toujours taxés, mais on embaucherait plus facilement. Il en résulterait de facto une baisse des allocations chômage, moins de dépenses de l’État pour indemniser les chômeurs, moins de taxes… un surcroît de produits et services moins chers et du travail pour tous ! Sans doute serait-ce également la meilleure solution pour lutter contre le travail dissimulé et ainsi, permettre aux caisses de Sécurité sociale de capter des montants colossaux ; l’éventuel bénéfice-risque de la fraude devenant par trop déséquilibré au regard d’une situation régulière en matière de charges sociales… Si les salaires étaient peu chargés les employeurs pourraient créer beaucoup plus d’emploi, actuellement seuls les très-très riches peuvent encore s’offrir un chauffeur, un emploi non indispensable pour les petites entreprises. Si la classe dite moyenne pouvait assumer les services d’une femme de ménage, d’un jardinier ou autre service dénué d’avantage fiscal, là aussi l’État engrangerait d’importantes rentrées dans ses caisses et la création d’emplois exploserait. Cela simplifierait la vie des administrations qui n’auraient plus à comprendre pourquoi on crée des niches fiscales pour pallier les hausses d’impôts ou de taxes, pour éviter de destruire les emplois à domicile existant. Bien entendu, il est hors de question de baisser les salaires actuels, mais baisser le SMIC uniquement pour les nouveaux contrats CDI… Cela offrirait rapidement un travail non qualifié à bon nombre de personnes. Ce lissage pourrait motiver les futurs employeurs et cela créerait un sentiment d’utilité citoyenne et économique, qui participerait à l’apaisement des tensions sociales.
Le bonheur se trouve aussi dans la diversité et la relativité des situations des citoyens les uns par rapport aux autres, sans acception hiérarchique ou jugement de valeur, encore moins de volonté de nivellement. Si la médiocrité s’avérait être l’étalon de l’égalité inscrite au fronton de la République, nous serions tous uniformément stéréotypés et condamnés à l’être, pour que ce type d’égalité perdure. C’est le cas en Corée du Nord, ce fut le cas en Chine communiste et en URSS, mais cette égalité à valeur faussement mystique est fatalement contraire à la nature humaine, qui tend vers la diversité, la différenciation, l’affirmation des individualités, des compétences, des dons, de la créativité, de l’inventivité. Contraindre les peuples à une égalité forcée, au sein d’ordres immuables, ou de castes, est insupportable… Le progrès social s’accompagne d’une certaine forme d’évolution, d’élévation, de progrès, transmissible… Il ne suffit pas d’augmenter unilatéralement le SMIC pour espérer instituer une dose d’harmonie sociale, surtout si cette hausse salariale se limite aux seuls bas salaires… Quid du ressentiment de ceux qui pour en arriver au même revenu ont trimé, sué sang et eau, donné de leur être pour mériter ce qu’ils estiment leur être dû… Il n’est rien de pire que d’instaurer un sentiment d’injustice, y compris en termes de discrimination sociale et salariale. Que des politiques coupés des réalités du travail, mus par préjugé idéologique, usent du paramètre hausse du SMIC à des fins démagogiques peut se comprendre, mais il faut savoir que les entreprises confrontées à des réalités comptables et fiscales purement arithmétiques, ne pourront faire que 2 et 2 font 5 et qu’il n’existe pas de “yield management” socialement tolérable en matière salariale hors la rétribution au mérite. Les politiques, pour conquérir ou conserver du pouvoir, créent de la précarité ou de la frustration avec des ambitions parfois inavouables. Créer plus de “petits salaires” pour ceux qui débutent dans la vie active est certainement plus juste que d’empêcher l’évolution des méritants.
Le travail, quel qu’il soit, peut être un accomplissement. Il faut simplement en reconnaître la valeur au sens humain du terme.