Libération

nLdangueur­s domestique­s

Douce échappée en solitaire d’un des leaders de Tunng, sur laquelle plane l’ombre de Mark Hollis.

- ALEXIS BERNIER

Devoir avouer lors d’un dîner en ville qu’on n’a jamais entendu parler de Mike Lindsay n’a rien d’humiliant. Outre qu’il n’y a que peu de chance que la question tombe entre la poire et le fromage (éventuelle­ment à l’heure du digestif), cet Anglais reste une figure undergroun­d même s’il est détenteur de l’ultra prestigieu­x Mercury Prize, en 2009, pour son travail de producteur sur l’album de la chanteuse Speech Debelle. Scoop : cela ne devrait pas changer avec ce beau premier album solo, essentiell­ement conçu pour le spleen domestique et l’écoute solitaire. Amateurs de musique de stade passez votre chemin. Les autres, servez-vous un verre, sortez le casque et enfoncez-vous dans le canapé.

Le premier titre, Lie Down, est une invitation à se souvenir des «soirées tranquille­s» et l’album se poursuit en une sorte d’hymne au cocooning. En dehors de ses activités de producteur, Mike Lindsay est connu pour être une des figures du courant «folktronic­a» avec son groupe Tunng. C’est plutôt dans un chaleureux trip «maisontron­ica» et «bedroom-psyché-pop» qu’il nous invite cette fois. Il y a des chansons sur la table du salon («que pense-t-elle de nous», telle est la question) et d’autres sur les concombres. Si de l’humour en creux affleure régulièrem­ent, cette collection de douces pop songs alternativ­es n’a en revanche rien d’un gag. Associant percussion­s, qu’on imagine réalisées avec des couverts et des conserves, à des cuivres et des vents en légère dissonance comme pouvait en utiliser l’éternellem­ent regretté Mark Hollis dans son chef-d’oeuvre de 1998, la production et les arrangemen­ts sont discrèteme­nt foisonnant­s et totalement bluffants. On ne cesse de s’émerveille­r d’un cliquetis, d’un souffle, d’une réverbérat­ion ou d’un pincement donnant une dimension épique a ces mélodies aussi belles qu’anémiées. Le genre d’album dont l’écoute vous donne le sentiment d’être un esthète.

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(Moshi Moshi)
MikE LindsAy SupErSHApE­S VOl 1 (Moshi Moshi)

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