Kim et Poutine : des «frères d’armes» main dans la main
Les duettistes balistiques sont de retour. Le président russe Vladimir Poutine est attendu en Corée du Nord dans les «prochains jours», selon plusieurs sources à Séoul et Tokyo. Ce voyage imminent constituerait la réciproque à la visite de Kim Jong-un dans l’ExtrêmeOrient russe en septembre. Ce serait surtout la première venue d’un président russe au Nord depuis juillet 2000 et la nouvelle confirmation d’un renforcement des relations entre les deux pays depuis la guerre en Ukraine. La Corée du Sud dit «observer de près les préparatifs de Poutine». Depuis le début de l’invasion de l’Ukraine par la Russie, Moscou et Pyongyang ont développé «des liens indéfectibles de frères d’armes», comme l’a souligné le chef d’Etat nord-coréen dans un message adressé mercredi à Poutine. Le régime de Kim Jong-un est régulièrement accusé d’avoir fourni des armes à Poutine. Dans une interview à l’agence Bloomberg vendredi, le ministre sud-coréen de la Défense, Shin Won-sik, a d’ailleurs indiqué que Séoul avait détecté l’envoi d’au moins 10 000 conteneurs de la Corée du Nord vers la Russie. «On s’attend à ce que Poutine cherche à renforcer la coopération avec la Corée du Nord en matière de sécurité, en particulier en ce qui concerne les fournitures militaires telles que les obus d’artillerie, qui sont nécessaires pour saisir une chance de victoire», a déclaré Shin. Il a également déclaré que la Corée du Nord avait envoyé des dizaines de missiles balistiques pour aider Poutine à attaquer l’Ukraine. A plusieurs reprises, les deux puissances parias de l’Asie ont rejeté ces accusations d’accords et échanges militaires. Pourtant, des missiles nord-coréens ont bien été tirés contre les Ukrainiens. Comme Libé l’écrivait en janvier, sur la base d’un rapport des spécialistes de l’organisation britannique Conflict Armament Research, un engin fabriqué en Corée du Nord avait frappé Kharkiv le 2 janvier. Les débris retrouvés provenaient d’un missile balistique nordcoréen de la série Hwasong-11 lancé depuis le territoire russe, avaient précisé des observateurs de l’ONU. Comme l’a souligné vendredi le quotidien Korea JoongAng Daily, il y a désormais une «concordance parfaite des intérêts stratégiques des deux pays». Pyongyang et Moscou ont besoin l’un de l’autre. En échange des munitions, la Russie a repris ses exportations de pétrole, envoyé à la Corée du Nord des technologies destinées à l’aider dans ses projets de déploiement de satellites espions ainsi que d’armes conventionnelles.
Cet alignement russo-nordcoréen sera très probablement réaffirmé lors de la visite de Poutine à Pyongyang. Les deux leaders pourraient décider d’un renforcement de leur coopération. Iront-ils jusqu’à relancer le traité d’alliance entre la Corée du Nord et la Russie, supprimé par Moscou en 1996, qui comportait des dispositions pour un soutien militaire mutuel? C’est l’une des craintes de Séoul et de Tokyo. Et un signe de plus que la péninsule coréenne est redevenue un foyer de tensions menaçant.