La réforme du recrutement des profs ne fait pas l’unanimité
Un nouveau chambardement dans la formation des enseignants, pour tenter de remédier à la crise des vocations qui frappe l’éducation nationale. Emmanuel Macron a annoncé vendredi la réforme du concours de recrutement des futurs professeurs, du premier comme du second degré, à partir de 2025. Le concours sera passé au niveau bac +3, à la fin de la licence, au lieu de bac +5. Les recrues poursuivront leur formation en master 1 comme élèves fonctionnaires, bénéficiant à ce titre d’une rémunération de 1400 euros net par mois. En M2, ils seront fonctionnaires stagiaires payés 1 800 euros net par mois.
Le projet doit permettre, selon Emmanuel Macron, «de bien mieux former, de mieux préparer […] et de mieux reconnaître aussi nos compatriotes qui veulent s’engager dans ce métier». «On ne peut se satisfaire d’avoir un certain nombre de postes non pourvus», dit-on à l’Elysée. La rentrée de septembre 2023 s’était ainsi déroulée sous tension avec plus de 3100 postes non pourvus aux concours du printemps précédent. Un peu mieux que le cru 2022, qui avait tourné à la catastrophe, avec 4 000 postes vacants. La faute à une réforme datant de 2021 et imposant de passer les concours à la fin de la seconde année de master, et non plus de la première, qui avait contraint des bataillons d’étudiants à valider un an de scolarité supplémentaire. C’est donc un aveu d’échec du chef de l’Etat, qui défait ce que ses ministres (en l’occurrence Jean-Michel Blanquer) avaient mis en place.
Pour les enseignants du primaire, l’exécutif mise fort sur le développement d’une licence spécifique, baptisée LPPE (licence préparatoire au professorat des écoles), que l’Elysée souhaite «plus professionnalisante» et centrée sur les «méthodes pédagogiques, la posture et les gestes professionnels». A terme, 80% des étudiants reçus au concours devraient en être issus, selon les estimations. Côté secondaire, les élèves continueront à suivre une licence disciplinaire avant de passer le concours. Guislaine David, porte-parole du Snuipp-FSU, syndicat majoritaire chez les enseignants de primaire, n’est pas emballée. D’abord elle craint que cette nouvelle licence LPPE ne resserre le vivier de candidats : «J’ai beaucoup de doutes sur le fait que de jeunes bacheliers veuillent à coup sûr devenir professeur et se lancent dans cette formation très spécifique.» Et de redouter, également, qu’en limitant les passerelles pour des étudiants d’autres filières ou des personnes en reconversion professionnelle, on ne se prive d’autant de «candidats potentiels».
Mais Guislaine David voit aussi d’un mauvais oeil les contours de la formation: «On a l’impression d’une volonté de reprise en main de l’éducation nationale et d’un affaiblissement des contenus de formation. Il faut des savoirs académiques pour devenir professeur. Or, avec ce projet, les enseignants sont vus comme des exécutants, pas comme des concepteurs. Comme s’il leur suffisait d’avoir les bons manuels et les bonnes fiches pratiques.» Une position partagée par les autres syndicats