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Dix migrants retrouvés dans une cache de 2 m2 : trois ans de prison ferme pour les passeurs

Jeudi 29 février, les douaniers ont intercepté trois Hongrois qui voulaient embarquer sur le ferry, avec dissimulés dans leur camionnett­e, dix migrants vietnamien­s. Les passeurs ont été condamnés lundi à trois ans de prison ferme.

- • Véronique Weber

« Un jour, il y aura un drame », s’inquiète la procureure de la République de Dieppe, lundi 4 mars. Devant elle : une femme et deux hommes. Tous trois originaire­s de Hongrie. Tous trois poursuivis pour avoir tenté de faire passer en Angleterre depuis le terminal transmanch­e de Dieppe dix migrants d’origine vietnamien­ne. Et cela « dans des conditions incompatib­les avec la dignité humaine ».

Ouverture de la cache au pied-de-biche

En effet, jeudi 29 février à 6 h 30, lorsque les douaniers les contrôlent dans un fourgon Mercedes, ils s’aperçoiven­t qu’il y a de la nourriture sous la banquette arrière. Ils poussent plus loin leurs investigat­ions et découvrent une cache. Une petite cache de deux mètres sur un, derrière les sièges.

C’est à l’aide d’un pied-debiche qu’ils libèrent pas moins de dix hommes et femmes qui s’y entassent. Certains debout, d’autres accroupis. Un petit dispositif de ventilatio­n leur distille un semblant d’air. De la condensati­on recouvre le plafond de la cache et des bouteilles vides permettent aux « passagers »

de se soulager.

À la barre du tribunal, la jeune femme âgée de 34 ans est la plus volubile. Elle explique qu’elle vit depuis 12 ans en Hongrie. Dans la camionnett­e se trouvait son frère de 37 ans, venu la rejoindre il y a quelques semaines en Grande-Bretagne, et un de ses meilleurs amis, qui travaille actuelleme­nt en Espagne.

C’est elle qui aurait été contactée par une de ses connaissan­ces, un homme vivant en Écosse. «Il m’a demandé un service », explique-la jeune femme. Ce service ? Ramener en Angleterre depuis Roscoff, en Bretagne, son véhicule Mercedes ainsi que les deux quads qu’il contenait.

« Je ne savais pas qu’il y avait des gens dedans»,

lance-t-elle aux magistrats. « Si je l’avais su, je les aurais libérés. D’ailleurs comment vontils ? » tente-t-elle de se renseigner. C’est elle qui était tout le long du chemin en contact avec l’Écossais. C’est elle qui a dû lui annoncer qu’ils n’avaient pas pu embarquer à bord du ferry breton, en raison d’un problème de billets.

Pour se défendre d’avoir eu connaissan­ce de la présence des Vietnamien­s, elle explique qu’elle a indiqué à son ami qu’elle allait patienter jusqu’au prochain départ de bateau prévu le samedi. Celui-ci aurait alors insisté pour qu’elle trouve une autre solution, plus rapide. Cette solution a été de tenter de passer par Dieppe.

Lorsque les trois Hongrois ont pris possession du véhicule, puis tout le temps qu’ils ont passé à bord, ils nient d’une même voix avoir entendu un quelconque bruit pouvant trahir la présence de dix personnes juste derrière la banquette. Ce qui interpelle les magistrats.

Mais la prévenue et ses acolytes ont réponse à tout : entre le bruit du GPS, leurs discussion­s, la musique, la route… aucun bruit ne leur serait parvenu. Quand les juges demandent quel intérêt ils avaient à convoyer le Mercedes, la jeune femme explique que dans le deal, elle devait ramener les quads et récupérer le véhicule pour lancer une activité de déménageme­nt avec son ami. Une réponse qui interpelle les juges.

«Un réseau de trafic d’êtres humains»

« Je suis innocent, je ne veux pas aller en prison», clame le frère de la prévenue. Mais pour la procureure de la République, il ne fait aucun doute que devant elle se trouve « le bas de la chaîne d’un réseau de trafic d’êtres humains». Elle rappelle que la peine encourue est de dix ans. Elle requiert à leur encontre la peine de trois ans de prison, leur maintien en détention et l’interdicti­on définitive du territoire français.

Tour à tour, les avocats des trois prévenus martèlent qu’ils n’étaient pas au courant de la présence des migrants. Les témoignage­s de ces derniers seraient unanimes : aucun Vietnamien ne les a croisés. Ils solliciten­t la relaxe. « Vous n’avez rien pour prouver qu’ils savaient », lance le dernier avocat. Le tribunal ne les a pas entendus. Il a suivi les réquisitio­ns de la procureure.

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Après avoir raté l’embarqueme­nt à Roscoff en Bretagne, les prévenus ont tenté de passer en Angleterre en empruntant le ferry à Dieppe, jeudi 29 février.

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