Le Réveil Normand (Eure / Eure-et-Loir)
L’émoi après la mort de Perrine, 14 ans, dans l’accident du car en direction de la Côte d’Or
Après l’accident de car qui a coûté la vie à une adolescente des Andelys en Côte d’Or et fait 12 blessés, une vague d’émotion submerge la commune et plus largement l’Eure.
Les Andelysiens ont découvert l’ampleur du drame dimanche matin. Dans la nuit du samedi 2 au dimanche 3 mars, un autocar parti de la gare routière avec une cinquantaine de passagers à son bord a subi un accident sur l’autoroute A6 en Côte-d’Or.
Alors qu’il circulait au niveau de Chailly-sur-Armençon, près d’Éguilly, le car s’est brusquement couché sur le flanc. Il transportait 41 enfants, âgés de 5 à 16 ans, et leurs 9 accompagnateurs, pour un séjour au ski organisé par l’association Voyages Vacances Loisirs dans la station de Saint-Léger-les-Mélèzes (Hautes-Alpes).
Un décès, douze blessés
Dans l’accident survenu vers 1 h 40, Perrine Bourgeois, une adolescente de 14 ans, fille d’agriculteurs installés de longue date aux Andelys, est décédée.
La présidente de l’association a été grièvement blessée. Son pronostic vital n’est pas engagé, mais mardi, elle était encore en réanimation. Onze autres blessés sont à déplorer.
Immédiatement après l’accident, la préfecture de la Côte d’Or a déclenché le plan Novi (nombreuses victimes). 80 pompiers et gendarmes sont dépêchés sur l’autoroute pour secourir les victimes et sécuriser les lieux.
Gestion de crise à distance
Dans le même temps, la nouvelle arrive aux Andelys. « J’ai été réveillé à 3 h 30 par le directeur de cabinet du préfet qui m’a informé qu’il y avait eu un accident de car avec des Andelysiens à l’intérieur sur l’autoroute A6 », raconte Frédéric Duché, maire. « J’ai été rappelé une heure plus tard pour m’indiquer qu’une enfant était décédée. Accompagné des gendarmes, je me suis rendu chez la famille pour annoncer la terrible nouvelle. Cela a été une vraie épreuve, car c’est une famille que je connais très bien. »
Le maire a constitué une cellule de crise restreinte avec Armelle Kratz, adjointe à l’éducation et Sabrina Boucetta, directrice générale adjointe, responsable du pôle Services à la population et proximité.
À l’autre bout de la France, afin d’éviter que les enfants ne soient encore plus traumatisés, les secours demandent aux accompagnants de ne pas annoncer immédiatement qu’une passagère est décédée. « C’était très surprenant, car certains enfants étaient très choqués et d’autres continuaient à jouer. Je garde en mémoire l’image d’une gamine complètement absente », se souvient Jean-Marie Faivret, maire de la commune d’Eguilly.
Une nuit de stress pour les familles
Sophie, habitante d’Heuqueville, et son mari prennent la route immédiatement vers la Bourgogne. « Nos deux fils, Nils et Noé, 9 et 16 ans, étaient dans le car. Forcément, quand on a reçu cet appel au milieu de la nuit, cela nous a beaucoup inquiétés », raconte-t-elle une fois rentrée en Normandie. L’aîné de ses fils était éveillé au moment de l’accident. « Il pleuvait. On a senti le car partir sur le côté puis le conducteur a essayé de le remettre sur la route. Puis c’est allé très vite », explique celui qui a été légèrement blessé dans l’accident. Son petit frère, endormi au moment du choc, n’a pas été blessé.
« Dix ou vingt minutes après le premier coup de téléphone, on a su que nos enfants étaient en sécurité. On a quand même été très inquiets. On se demandait dans quel état psychologique, on allait retrouver nos garçons », reprend Sophie.
Sur place, la solidarité s’organise. Jean-Marie Faivret, maire du village bourguignon, raconte. «Les services de la sous-préfecture de Beaune ont coordonné les secours. Nous avons d’abord ouvert la salle des fêtes de Chailly-sous-Armançon, mais elle s’est révélée trop petite. Les enfants ont ensuite été transportés au collège de Pouilly-en-Auxois. Avec mes collègues élus des communes du secteur, nous avons été chercher de quoi préparer un petit déjeuner et des sandwichs en attendant l’arrivée des familles ».
Bouquets de fleurs et cellule psychologique
Les retrouvailles se déroulent au fil de la journée et la quasi-totalité des passagers sont rapatriés vers la Normandie dimanche soir alors que quelques bouquets de fleurs sont déposés sur les marches de la mairie.
Le lendemain, avec le concours de la préfecture de l’Eure, une cellule d’urgence médico-psychologique (CUMP) est mise sur pied composée de 17 professionnels de santé venus de l’hôpital de Navarre, à Evreux. Elle s’installe à la salle des fêtes des Andelys et accueille enfants et familles à partir de 14 h. À l’ouverture, trois membres du gouvernement sont présents, Sébastien Lecornu, ministre des Armées et vice-président du Département, Nicole Belloubet, ministre de l’Éducation nationale, et Sarah El Haïry, ministre déléguée chargée de l’Enfance, de la Jeunesse et des Familles. Ils viennent dire leur soutien et leur émotion aux parents de Perrine.
En fin d’après-midi, un pointpresse est organisé par Sandrine Cocagne, référente départementale et psychologue clinicienne au Nouvel hôpital de Navarre, et le psychiatre Mahdi Cheifa.
« On a entendu la parole des familles et leurs émotions, y compris celle de la famille de l’adolescente décédée », expliquent-ils.
« Globalement, les enfants vont plutôt bien même s’ils sont fatigués. Ils réagissent différemment selon leur âge. Il y aura un travail à faire sur le long terme pour certains« poursuit Sandrine Cocagne.
Si la cellule de groupe n’est plus active, les victimes auront toujours la possibilité d’être prises en charge dans le cadre d’un suivi individualisé selon leurs besoins.
Le chauffeur du car mis en examen
De son côté, le parquet de Dijon a ouvert une enquête pour déterminer les circonstances de l’accident. Le chauffeur a déclaré dès le début de sa garde à vue qu’il «pense s’être assoupi». Ce dernier a fait l’objet de dépistages d’alcoolémie et de stupéfiants qui se sont révélés négatifs. Le procureur de la République de Dijon a indiqué, lundi, que le chauffeur était mis en examen pour homicide involontaire et placé sous contrôle judiciaire.
Les Andelysiens attendent désormais les obsèques de l’adolescente. Une cérémonie était organisée par la famille et la municipalité à la Collégiale Notre-Dame vendredi à 14 h 30. Avant cet hommage, un registre de condoléances a été ouvert à la mairie.
❝ Nous avons appelé toutes les familles concernées, réparties sur 16 communes entre Les Andelys et le Vexin normand, pour savoir si elles étaient parties chercher leurs enfants et les rassurer sur leur état de santé FRÉDÉRIC DUCHÉ