Vers une quantité de neurones… quantiques !
Petite, elle se rêvait en écrivaine. Puis Julie Grollier a pris conscience que, dans tous les contes qu’elle dévorait, il était question de sciences. « Mon roman préféré était Madame Brisby et le secret de Nimh, dans lequel une souris est sauvée par des rats physiciens », se souvient, amusée, la directrice de recherche au laboratoire Albert Fert, CNRS, Thales, université Paris-Saclay. N’étant pas du genre à abandonner ses projets – en témoigne son recueil de poèmes, intitulé (peau), publié chez Tango Girafe en 2023 –, cette excellente élève s’est donc tournée vers la « voie royale » : prépa de maths, école d’ingénieurs, doctorat, puis deux post-docs. Son sujet de prédilection ? La spintronique, une technique qui exploite le spin, une propriété quantique de l’électron, pour ajouter des fonctionnalités aux circuits électriques, notamment pour booster leur mémoire. La lauréate de la médaille d’argent du CNRS en 2018 se passionne pour les réseaux de neurones artificiels, ces systèmes qui, inspirés des neurones biologiques, permettent aux intelligences artificielles de résoudre des problèmes complexes, comme le traitement du langage naturel. Son but ? Réduire la consommation énergétique des IA en construisant une puce neuromorphique qui, à l’image du cerveau humain, soit capable de stocker et de traiter directement les données qui les alimentent en utilisant peu d’électricité. En 2017, c’est la consécration pour cette insatiable curieuse: avec son équipe, elle parvient à réaliser un premier neurone artificiel, spécialisé en reconnaissance vocale. Plus récemment, elle a réussi à créer un réseau miniature d’une dizaine de neurones… « Un début », concède-t-elle. « Mais cette structure ouvre la voie à la création de réseaux de milliers de neurones ! » se réjouit-elle. Au-delà de son sens de l’intuition, qui a impressionné Albert Fert, son ancien directeur de thèse – colauréat du prix Nobel de physique de 2007 pour sa découverte de la magnétorésistance géante en 1988 –, Julie Grollier fait siennes les valeurs de son mentor : « bienveillance et encouragement », même dans les projets les plus fous