Le Pays d'Auge (Édition Littoral)

Une première cérémonie sans les vétérans très émouvante à la batterie de Merville-Francevill­e

- • Anthony DERESTIAT

La cérémonie du 80e DDay marque l’entrée dans le monde d’après pour la batterie de Merville. Pour la première fois mercredi, il n’y avait plus aucun vétéran du 9e bataillon de parachutis­tes, Phil Ward étant décédé l’an passé.

La fin d’une époque et le début d’une autre. Charge aux génération­s futures de faire vivre, encore et encore, la mémoire à la batterie de Merville. Pour la première fois en ce 80e anniversai­re du DDay, la cérémonie hommage au 9e bataillon de parachutis­tes britanniqu­es s’est tenue sans les principaux intéressés, mercredi. Le dernier vétéran, Phil Ward, s’est éteint en août dernier, à l’âge de 98 ans. «Il était très en forme l’an dernier, nous pensions qu’il viendrait », a regretté Paul Hill, le président de l’associatio­n du 9e bataillon. « Ils étaient venus pour faire du monde un endroit plus paisible. Leur action a coûté cher, mais ils ont réussi. Ils ont sauvé de nombreuses vies. »

Dans la nuit du 5 au 6 juin 1944, le bataillon était chargé de sécuriser les plages du Débarqueme­nt en neutralisa­nt la batterie de Merville, point central de la défense allemande. Une opération périlleuse, qui a failli échouer lorsque les avions ont confondu l’estuaire de l’Orne avec celui de la Dives au moment de larguer les parachutis­tes. « Ils avaient entre 16 et 20 ans et croyaient avoir la vie devant eux. Ils ne savaient pas encore. Non, ils ne savaient pas que beaucoup allaient mourir sans même combattre.

Seul le lieutenant-colonel Terence Otway savait que le succès de l’opération relèverait de l’exploit », a narré le maire de la commune, Olivier Paz, dans un long discours poignant.

Les visages des héros sur le château d’eau

« En dépit d’effectifs réduits au quart, sans armes et sans moyens de transmissi­on, ils y allèrent. Les premiers hommes se couchèrent sur les barbelés pour servir de pont humain. Ils progressai­ent sous le feu des mitrailleu­ses allemandes. Ils avaient de la chance ou n’en avaient pas. Les 75 survivants ne savaient pas que c’était impossible, alors ils l’ont fait. »

Tout près de la batterie, le visage des héros s’affiche désormais sur une banderole sur le château d’eau.

❝ C’est tellement triste d’être ici à cette date sans aucun d’entre eux. Je vois les chaises vides où les vétérans s’asseyaient. PAUL HILL

«Dans un pub au ciel, ils nous regardent. Du haut du château d’eau, ils regardent la terre qu’ils ont libérée. »

Sous un grand soleil et au milieu des coquelicot­s, les milliers de soldats, reconstitu­teurs, élus, habitants de Merville et visiteurs ont rendu un hommage appuyé aux Paras britanniqu­es, tandis que quelques avions passaient, au loin, dans le ciel. «Il est plus que temps de préparer le passage de témoin, appelle Sylvie Dupont, la présidente du groupement d’intérêt public (GIP) de la Batterie.

Très vite plus personne ne sera là pour raconter ce qui s’est passé, et pourtant il ne faudra pas l’oublier. »

Pour ne pas oublier, la batterie présente chaque soir, jusqu’à samedi, une reconstitu­tion son et lumière de l’assaut, dont toutes les places sont écoulées. Nul doute que du ciel ou du château d’eau, Phil Ward, Terence Otway et tous leurs camarades ne rateront pas une miette du spectacle.

❝ Il y a quand même une bonne nouvelle dans leur disparitio­n : là-haut, le 9e bataillon s’est totalement reformé. OLIVIER PAZ

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