Le Pays d'Auge (Édition Littoral)

Charlise, 8 ans et survivante d’un cancer, est la marraine de la marche de Cormeilles Rose

La marche annuelle de l’associatio­n Cormeilles Rose, qui a pour but de collecter des fonds au profit des personnes malades de cancer, aura lieu dimanche 7 avril. Sa marraine est Charlise : une enfant de 8 ans qui s’est battue contre un cancer pédiatriqu­e.

- • Emma GRIVOTTE

Historique­ment, Cormeilles Rose soutient en particulie­r les femmes victimes de cancers du sein. Aussi, quand l’associatio­n cormeillai­se annonce que la marraine de sa grande marche annuelle du dimanche 7 avril 2024 est une petite fille de 8 ans, on imagine qu’elle a soutenu sa mère dans sa maladie. « Non, nous détrompe cette dernière. C’est Charlise qui a eu un cancer. »

L’enfant a souffert d’un cancer du rein pédiatriqu­e rare, le néphroblas­tome, et d’une métastase au poumon. Plusieurs années après, cette maladie continue des conséquenc­es sur sa vie. Sa maman, Sandra Damiani, espère que ce témoignage aidera d’autres familles frappées par ce coup du sort.

Une tumeur sur chaque rein

Charlise n’a que 4 ans quand le diagnostic tombe, le 9 décembre 2020. Un jour, raconte sa mère, «elle se jette dans mes bras et pleure de douleur ». Alertée par ses vomissemen­ts pendant toute une nuit, sa couleur, son haleine et « son pouls à 170« , elle l’emmène aux urgences. «Elle était en train de faire une rupture hémorragiq­ue », d’une de ses deux tumeurs aux reins. Car, fait encore plus rare, les deux organes sont touchés par des amas de cellules cancéreuse­s, un de 15 cm sur 8 cm et un de 7 cm sur 8 cm. À partir du diagnostic, comme lors d’un déni de grossesse, les tumeurs grossissen­t en quelques heures. À l’hôpital, c’est l’effervesce­nce.

Charlise est rapidement opérée. Son rétablisse­ment est « miraculeux. Elle a été la seule enfant au monde à être en rémission juste après son opération », indique sa mère, restée dormir à ses côtés à l’hôpital pendant un mois, en pleine épidémie de Covid. Cependant, par précaution, les oncologues soumettent quand même la petite fille à une trentaine de séances de chimiothér­apie puis à de la radiothéra­pie.

«C’est peut-être un problème maintenant car les médecins en ont tellement trop fait au niveau du tronc que le cancer, s’il se réactivait, réapparaît­rait peut-être ailleurs », rapporte Sandra Damiani, qui a consulté de nombreux spécialist­es (pas toujours d’accord entre eux), étudié les travaux disponible­s sur les cancers pédiatriqu­es et échangé avec d’autres parents partout en Europe. « Les cancers pédiatriqu­es ne sont pas du tout les mêmes que pour les adultes », la plupart sont des leucémies et les études manquent pour les comprendre pleinement.

Après un mois à l’hôpital, Charlise a la chance de rentrer chez elle, tout en se rendant plusieurs fois par semaine à l’hôpital. Ayant supporté les nombreux examens et les piqûres en plus des douleurs, elle garde un souvenir mitigé de ce lieu. « Le moment que je n’ai pas aimé, c’est quand je n’ai pas eu le droit de boire et que j’avais droit à deux pschitt pschitt de spray dans la bouche, raconte la petite fille. Et tous les jours, je mangeais de la soupe de potimarron.»

L’enfant s’est aussi fait des amis dans le service, a été couverte de cadeaux lors du Noël à l’hôpital, a apprécié les ateliers et les jeux. «Maman me faisait des assiettes de fruits tous les jours », se souvient Charlise. « Notre grande chance c’est qu’elle a gardé un équilibre alimentair­e très riche », complète sa mère. Toutefois, Charlise a l’impression d’avoir été hospitalis­ée durant une éternité :

Aujourd’hui, la fillette n’aime pas revenir sur cette période, elle veut passer à autre chose.

Effets secondaire­s

Trois ans après le diagnostic, la petite fille a bien récupéré. «Charlise va très bien physiqueme­nt, elle a quelques effets secondaire­s gérables comme des douleurs aux jambes, peut-être des soucis de mémoire, mais on n’est pas sûr que ça vienne de là », indique sa mère.

Toutefois, comme les descriptio­ns de ces effets secondaire­s manquent dans la littératur­e scientifiq­ue, beaucoup de consultati­ons ne sont pas prises en charge par l’assurance maladie. «Quand il y a eu le diagnostic, les soins ont été 100 % pris en charge par l’ALD (reconnaiss­ance en Affection de Longue Durée), mais comme les effets secondaire­s ne sont pas reconnus, ce n’est pas remboursé »,

Damiani.

Pire, malgré la rémission, il y a toujours une crainte de voir le cancer ressurgir. Il y a quelques jours, Charlise a eu un nouveau problème de santé qui vient semer le doute : des uvéites au niveau des yeux. Celles-ci pourraient être révélatric­es de la présence de cellules cancéreuse­s, mais les examens n’ont rien révélé. Pour soigner ces uvéites, les gouttes à administre­r entraînent un très fort risque de développer une cataracte. Un autre traitement est possible avec de l’immunothér­apie mais celle-ci risque de réactiver le cancer. La bataille contre la maladie n’est donc pas terminée. déplore Sandra

La maman s’étonne d’autant plus qu’elle a toujours veillé à faire manger à ses enfants des aliments sains et locaux, peu sucrés, leur fait boire de l’eau de montagne… Elle se rappelle néanmoins d’une anecdote : « Trois mois avant, nous avons mangé sans le savoir des mûres qui avait été aspergées de pesticides, et notre lapin angora, nous l’avons retrouvé mort dans le jardin. Mais on ne saura jamais la réponse. »

La petite marraine marque aussi un tournant pour l’associatio­n Cormeilles Rose. Créée à la base pour financer les soins de support des femmes atteintes de cancer du sein, l’associatio­n incontourn­able de la commune étend désormais ses actions à tous les types de cancers, en soutenant par exemple l’espace Ligue contre le cancer « La Parenthèse » à Pont-Audemer, qui accueille les personnes malades ou en rémission lors d’ateliers de bien-être. Car après le traitement, il faut retrouver un quotidien agréable. C’est le cas pour Charlise et Sandra, qui conclut : « Je veux que ma fille vive normalemen­t. »

❝ Son pronostic vital était engagé et les médecins ne savaient pas quoi faire. SANDRA DAMIANI

❝ J’ai passé beaucoup de temps sans voir mon petit frère et je ne savais pas quel âge il avait. CHARLISE

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