Le Pays d'Auge (Édition Littoral)
Harcèlement au travail sur la côte : le collègue « beauf et lourd » condamné
Un homme de 49 ans a été jugé pour harcèlement sexuel et moral à l’encontre d’une de ses collègues, employée dans une administration sur la Côte Fleurie.
« Je suis un dinosaure. J’ai du mal à me faire à cette nouvelle époque où on ne peut plus rien dire », a soupiré l’homme de 49 ans, jugé pour harcèlement sexuel et moral à l’encontre d’une de ses collègues. Son avocate, quant à elle, a déploré une « chasse aux sorcières ». « Il est devenu l’ennemi numéro 1. Il faudra systématiquement le déclarer coupable de comportements autorisés dans le passé ». Courant septembre 2018, une femme employée dans une administration de la Côte Fleurie se plaint à sa hiérarchie du comportement d’un de ses collègues avec lequel elle s’était nouée d’amitié. La mère de famille avait gardé le secret jusqu’au jour de janvier 2019 où il avait menacé de se suicider.
Affection et désir
Il pouvait s’agir de rapprochements physiques lors de repas entre collègues ou dans le cadre de leur travail ou bien de paroles, d’envois de sms et mails tendancieux. L’homme reconnaît avoir eu beaucoup d’affection pour la plaignante « mais aussi beaucoup de désir » mais assure n’avoir jamais tenu de propos sexuels, comme il le précisera à l’audience. « Je ne voulais pas être tenue pour responsable de son suicide », explique la victime. L’administration ne l’ayant pas soutenue, son avocate dénoncera le manquement de l’employeur à son obligation de sécurité, relevé également par les juges prud’homaux.
Depuis mi-septembre 2018 – peu après que la victime s’est séparée de son mari – le quadragénaire lui a proposé des « câlins » ou des « extras », précisant qu’il était un homme « quand même ». Une précision pour lui faire comprendre que, indépendamment du fait qu’elle était son amie et celle de son épouse, il était sensible à son charme.
La femme ayant eu quatre arrêts de travail dont un d’une durée de trois semaines, elle a pris attache avec son syndicat, avant de dénoncer la situation à la médecine du travail. C’est ainsi que l’affaire a été portée en justice. D’abord aux prud’hommes, puis devant le tribunal judiciaire. Dès lors, le mis en cause a envoyé une multitude de messages à sa collègue pour s’excuser de son « comportement ».
Macho et tactile
« On était amis depuis de longues années. Je m’inquiétais pour elle car elle était dépressive », explique-t-il, conscient d’être « un peu » macho et pouvoir être tactile « à tort ou à raison ». « Ça n’excuse pas mes propos mais ça explique ma familiarité ». Il parle de jeu, de gestes d’amitiés d’un copain sur lequel on peut compter et d’expressions verbales qu’il emploie couramment. Effectivement, une autre de ses collègues dira de lui que c’est un « beauf » et qu’il est « lourd » avec ses blagues audessous de la ceinture.
Ironie du sort
L’avocate de la défense relève « l’ironie du sort » qui a réuni quatre magistrates – trois juges et la procureure – et deux avocates – sa consoeur et elle-même – pour une procédure de harcèlement à l’égard d’une femme. « Ce que je craignais est arrivé. On vous demande de faire un exemple pour tous les machistes un peu lourds qui n’ont pas été jugés au cours de ces dernières décennies ».
Le quadragénaire est condamné à 6 mois de prison avec sursis. Il devra verser la somme de 3000 € à sa victime au titre de préjudice moral et 800 € pour ses frais d’avocat. Les juges ont rejeté la demande de non-inscription de cette peine au bulletin B2 de son casier judiciaire.