Baisse des taux : « Le temps est venu », confirme le patron de la Fed Jerome Powell
«Le temps est venu pour un ajustement de politique » monétaire, a déclaré ce vendredi le patron de la Fed Jerome Powell, « la direction est claire ». Une déclaration qui est attendue par les acteurs économiques depuis plusieurs mois, et qui est plutôt saluée par les marchés américains.
[Article publié vendredi 23 août 2024 à 16h16, mis à jour à 17h35] Une déclaration très attendue, et ce, depuis de nombreux mois. Ce vendredi, le président de la Réserve fédérale américaine (Fed), Jerome Powell, a clairement ouvert la porte à une première baisse des taux lors de la prochaine réunion de l’institution, prévue les 17 et 18 septembre, quelques semaines avant la tenue des élections présidentielles américaines du 5 novembre.
« Le temps est venu pour un ajustement de politique » monétaire, a bien affirmé Jerome Powell. Le président de la banque centrale américaine, qui s’exprimait lors de son traditionnel discours à Jackson Hole (Wyoming), assure que sa « confiance a augmenté quant au fait que l’inflation est sur un sentier durable de retour à 2% », la cible fixée par le mandat de la Fed.
« La direction à prendre est claire, le rythme des baisses de taux dépendra des données à venir, de l’évolution des perspectives et de l’équilibre des risques », entre maintien du plein emploi et contrôle de l’inflation, a aussi précisé Jerome Powell.
Plus de clarté désormais
Dans la foulée de l’annonce du président de la Fed, Bret
Kenwell, analyste des marchés américains pour le courtier eToro, souligne « la clarté » apportée par celui-ci « sur les réductions de taux » directeurs américains. Et d’ajouter : « M. Powell a reconnu la diminution des risques pour l’inflation et l’augmentation des risques pour l’emploi, déclarant qu’il était temps pour la Fed d’ajuster sa politique. » Pour mémoire, les régulières prises de parole de patron de la Réserve fédérale américaine n’avaient jusqu’ici pas donné d’indication sur la possibilité d’une baisse des
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taux d’intérêt. Pourtant, les marchés attendaient ce mouvement au premier semestre 2024, avant que l’inflation américaine persistante ne les amène à l’espérer pour septembre.
La Bourse de New York réagit plutôt bien
Seulement quelques minutes après les débuts de l’allocution du patron de la Fed, les marchés financiers exprimaient un forme de soulagement, illustrée par de nombreuses hausses. C’était tout particulièrement le cas de la Bourse de New York qui évoluait en hausse peu après son ouverture. Vers 16h15, heure de Paris, le Dow Jones ramassait 0,98%, l’indice Nasdaq s’octroyait 1,64% et l’indice élargi S&P 500 gagnait 1,18%. Les taux obligataires ont aussi immédiatement réagi positivement, le rendement des emprunts d’Etat américains à 10 ans tombant à 3,79%, contre 3,85% la veille en clôture. A la cote, le secteur des semi-conducteurs emmenait avec lui le Nasdaq, se reprenant après une séance difficile, jeudi. Nvidia (+3,60%), Broadcom (+2,77%) et Qualcomm (+2,98%) bénéficiaient ainsi d’une chasse aux bonnes affaires. En revanche, le dollar enregistrait une chute. Vers 16h20 à Paris, le billet vert tombait ainsi face à la livre, qui prenait
0,63% à 1,3174 dollar, après avoir touché 1,3200, son plus haut face au dollar depuis mars 2022. La devise américaine reculait également face à l’euro, qui montait de 0,39% à 1,1156 dollar.
Pas d’indication quant à l’ampleur de la baisse des taux américains
Mais l’analyste pointe le fait que « certains investisseurs auraient pu espérer une certaine clarté quant à l’ampleur des baisses de taux ». Sur ce sujet stratégique, l’immense majorité des analystes, notamment celle de l’outil de suivi FedWatch, table sur une première baisse des taux de 0,25 point de pourcentage, puis des baisses régulières, lors des deux réunions suivantes avant la fin de l’année. Autre facteur qui pousse en faveur de ce scénario : le département du travail américain a revu mercredi fortement à la baisse le nombre d’emplois créés aux Etats-Unis en 2024 pour l’année fiscale, se terminant fin mars. 800.000 devraient finalement être créés, « ce qui en fait l’une des révisions les plus importantes de l’histoire », soulignait cette semaine auprès de l’AFP Bastien Drut, responsable de la stratégie et des études économiques de CPR AM. Avant d’ajouter : « Cette faiblesse pourrait ouvrir la voie pour que la Fed baisse son taux directeur d’un demi-point en septembre. » Les opérateurs accordent désormais à ce scénario une probabilité de près de 40%, contre 3% seulement il y a un mois. Une réduction d’un demi-point trancherait avec le calibrage habituel des changements de taux, qui se font traditionnellement par quart de point.
Une déclaration qui va dans le sens de la dernière réunion de la Fed
Cette déclaration va dans le sens des conclusions de la dernière réunion de la Fed les 30 et 31 juillet, où plusieurs membres de l’institution avaient « souligné que les récents progrès dans la lutte contre l’inflation et la hausse du chômage plaidaient en faveur d’une baisse de 25 points de base ». Si cet avis n’était pas tout à fait majoritaire, la grande majorité de ces cadres soulignait que « si les données poursuivent dans la direction attendue, il serait probablement approprié d’assouplir la politique monétaire lors de la prochaine réunion ». Le compte-rendu du FOMC pointent également la « confiance » de ses membres face à des données qui « soulignent que l’inflation va vers la cible » de 2%.
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Jerome Powell réaffirme aussi son soutien à l’emploi américain
Lors de son allocution ce vendredi, le patron de la Fed s’est aussi exprimé sur le sujet de l’emploi américain, une autre prérogative de l’institution qu’il dirige. « Nous ferons tout ce qui est en notre pouvoir pour soutenir un marché de l’emploi solide », a ainsi assuré Jerome Powell. Le signe que l’emploi revient bien dans les radars de l’institution, alors que le rythme de créations d’emplois revient au niveau qui était le sien avant la pandémie. La révision mercredi des créations d’emplois sur l’année fiscale écoulée - la plus importante révision réalisée depuis 2009 - a montré que le marché de l’emploi américain était bien en phase de ralentissement avancée. Les données publiées jusqu’ici avaient en effet surestimé de plus de 800.000 le nombre d’emplois créés aux Etats-Unis entre début avril 2023 et fin mars 2024. « Cela met en avant un rythme toujours positif » de créations d’emplois mais « bien plus tempéré qu’envisagé initialement. La nuance est importante car, pour les économistes comme pour les décideurs, cela souligne que l’économie continue de progresser, mais à un rythme plus modéré », estimait ce vendredi le chef économiste d’EY, Grégory Daco, interrogé par l’AFP.