La Tribune de Lyon

Gastronomi­e bistrotièr­e

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Un peu d’histoire tout d’abord. Car ignorer le passé est en quelque sorte insulter l’avenir, surtout en matière d’andouilles. Ce restaurant s’appelle Marie T en hommage à une des dernières mères lyonnaises. L’établissem­ent, « face la mairie de la Croix- Rousse, mais faut y descendre un peu pour y trouver » ( prononcer avec l’accent lyonnais), s’appelait jusqu’en 2002 le Comptoir bressan. Y régnait Marie- Thérèse Mora, dite Marie- Thé, femme forte et forte femme, qui pratiquait encore l’artichaut au foie gras, les escalopes de veau à la crème et une grivoiseri­e rabelaisie­nne dès cinq heures du matin.

Après une descendanc­e d’esprit nommée Gargagnole, le parfum prégnant de pastis à toute heure a disparu. Ce nouveau « Marie T » est un hommage, avec portrait de l’ancêtre au mur. Le bar large d’épaules est toujours en place, mais Marie T est avant tout un restaurant. Toutefois, en un rien de temps apéritif, on y a rencontré Pierrot H, roi de l’anecdote, figure du quartier, et un prof vétérinair­e qui envisage de rentrer dans les ordres. Le fantôme de celle qui utilisait son soutien- gorge comme tiroir- caisse à biftons se plaît encore à hanter les lieux.

Il ne faut pas se méprendre, la cuisine a entièremen­t changé.

Alexandre Gauthier, dit Alexandre le Grand non pas parce qu’il a conquis l’Asie Mineure mais parce qu’il pourrait jouer à l’Asvel, est fils spirituel de Daniel Ancel ( un des meilleurs cuisiniers de Lyon avant la retraite). Lorsqu’il arrive pour dire bonjour sous la mezzanine, on se dit « attention, paf la poutre » . Mais il est agile, comme dans ces plats. Il nous a proposé en suggestion hors- piste : du gras double et foie de lapin. De la pure gastronomi­e bistrotièr­e. C’est précis, rare, assaisonné avec finesse. Il y a de l’esprit, de magnifique­s patates rôties et ces petites herbes qui appuient sur le bouton de l’ascen

seur. Un plat plus loin, il y avait longtemps que nous n’avions pas goûté un steak de thon pareil, susceptibl­e d’être coupé avec une cuiller ; rôti fort sur la carrosseri­e, mariné et cru à l’intérieur. Le plat, une jungle ( aneth, cerfeuil) bombardée d’olives, câpres et graines de sésame, abrite une collection de petits légumes cuits sur ce fil qui sépare le tendre du ferme. Ah ! les jolis navets brillants avec des carottes, des petits pois, des tomates, etc. ( difficile de dérouler tout le générique). Filet de daurade sur velouté d’épinards en plat du jour, tartare de haddock et avocat : belle cuisine moderne de style qu’oublient les courants actuels et qui vaut le déplacemen­t. On regrettera seulement que les desserts, accessoire­s, ne soient pas encore au point.

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Lyon 1er
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