La Tribune de Lyon

« Il y a des voix qu’on entend plus que d’autres, comme celle des automobili­stes » « J’ai toujours été partisan d’un métro »

- NADINE GEORGEL Maire ( Les Écologiste­s) du 5e arrondisse­ment THOMAS RUDIGOZ

Le projet de TEOL vous comble- t- il, ou est- ce un simple moindre mal ?

Nadine Georgel : « Comblée, ce n’est pas ce que je me dis. Mais je suis très contente de l’avancée du projet et de la forme qu’il prend. Un moindre mal, non. Ce qui a pu m’être reproché, c’est que nous nous étions positionné­s en faveur du métro E pendant la campagne. C’était le seul projet sur la table à ce moment- là. Pour avoir suivi l’évolution de la réflexion du Sytral, la question à se poser c’est : quelle infrastruc­ture pour quel territoire ? Le critère principal, c’est la densité. La moyenne lyonnaise, c’est 11 000 habitants au mètre carré. Le 5e, c’est 7 000, et Tassin, 3 000. L’endroit le plus dense de l’arrondisse­ment, c’est le VieuxLyon, et il est déjà desservi par le métro. C’est bien sur le haut qu’il y avait des besoins. Il y a aussi un besoin à Saint- Paul, mais cela dépend de la Région. Car Saint- Paul – Gorge- de- Loup, c’est moins de cinq minutes en train, mais un billet à part entière. Il y a une attente et des besoins importants, d’autant que le Pointdu- Jour a connu une densificat­ion amorcée indépendam­ment du TEOL. Le tram est une infrastruc­ture modérée pour une densificat­ion modérée. Ce sont bien les orientatio­ns et les caractéris­tiques que nous souhaitons garder.

TEOL, Voies lyonnaises, fermeture de la montée du Chemin- Neuf… L’arrondisse­ment risque- t- il d’être découpé, fracturé, ses différents quartiers encore plus isolés ?

C’est une crainte que j’entends, mais quand on a fermé le Chemin- Neuf à la montée en 2020, personne n’a crié à l’isolement. L’équipe précédente avait même coupé le ruban avec nous. Alors quand on ferme à la descente, on deviendrai­t une île ? C’est curieux comme argument. Ça sous- entendrait que le lien n’existerait que par la mobilité automobile. Et le VieuxLyon n’est pas isolé de la Presqu’île, on peut s’y rendre à pied, en vélo ou en métro. Pour Saint- Just, il y a le funiculair­e. Y a- t- il vraiment des gens de Saint- Just qui descendent en ville en voiture ? Il y a d’autres solutions.

Ces aménagemen­ts risquent de pénaliser les personnes âgées, les automobili­stes, les gens du Point- duJour ou d’ailleurs qui n’ont pas le choix. La montée du Chemin- Neuf et la rue de l’Antiquaill­e pourraient­elles devenir un gymkhana pour les riverains avec ces nouveaux sens uniques ?

L’arrondisse­ment a un taux de motorisati­on assez élevé, comparable à celui de la première couronne jusqu’à Saint- Just et, à partir de Saint- Just, il ressemble plus à celui de Tassin. Il y a des voix qu’on entend plus que d’autres, comme celle des automobili­stes. Je ne joue pas le jeu des uns contre les autres. Il y a une habitude, et sans émettre de jugement, nous devons accompagne­r une phase de transition. Ça tire. Et dans le 5e, contrairem­ent à ce que j’entends, on ne peut pas dire qu’on a tout fait seulement pour le vélo. Oui, ça peut s’entendre que la voiture reste un moyen d’autonomie. Sauf pour les personnes très âgées. Il y a aussi un jour où l’on peut être amené à arrêter de conduire. Donc là, qu’est- ce qu’on a comme solution ? Le transport en commun en étude. Dire qu’on prend la voiture jusqu’à ce qu’il y ait une offre, c’est une perspectiv­e purement fonctionne­lle. Il y a des habitudes qui orientent le choix. Il y a pas mal de gens dans le 5e qui ont le choix des transports en commun et qui, par habitude ou préférence, continuent à prendre la voiture. Et oui, on portera une attention particuliè­re aux quelques situations où cela peut être ubuesque. On l’a en tête.

Comment tout cela peut- il changer la face du 5e ?

Le TEOL peut aider à débloquer les choses. On a beaucoup d’entreprise­s, d’acteurs de la santé et de l’éducation. J’ai récemment rencontré les responsabl­es du centre hospitalie­r des Massues, ils l’attendent avec impatience. C’est un facteur d’attractivi­té. Mais ce ne sera pas une révolution. Je ne doute pas que, si vous revenez dans 20 ans, vous reconnaîtr­ez encore le quartier ! »

maire du 5e arrondisse­ment de 2014 à 2017 et ancien député Renaissanc­e de la 1re circonscri­ption du Rhône

Le TEOL est- il une bonne solution pour le 5e arrondisse­ment, plutôt que le métro E ?

Thomas Rudigoz : « Je suis mitigé parce que j’ai toujours été partisan d’un métro, et ce projet n’est pas satisfaisa­nt dans son ensemble. Je me satisfais néanmoins a minima de ce qui est proposé, même si le TEOL ne répond pas totalement aux besoins du territoire et crée beaucoup de perturbati­ons pour ceux qui ne seront pas sur la partie enterrée du tracé, comme à Tassin où je pense qu’il y aura des recours et opposition­s. Il n’y a pas eu de nouvelle ligne de métro depuis la création de la ligne D en 1991, donc les écologiste­s ne sont pas les seuls responsabl­es. Gérard Collomb, lui, l’avait décidé. Il avait la déterminat­ion de le faire, avait commandé des études. Et les écologiste­s sont arrivés, ont enterré le projet — sans mauvais jeu de mots — et puis finalement l’ont sauvé parce qu’un énorme travail technique et de concertati­on avait déjà été fait. Le premier coup de pioche ne sera pas donné avant la fin du mandat, donc je pense que le sujet sera à l’ordre du jour des prochaines élections métropolit­aines.

TEOL, Voies lyonnaises, fermeture de la montée du Chemin- Neuf… L’arrondisse­ment risque- t- il d’être découpé, fracturé, ses différents quartiers encore plus isolés ?

Bien sûr, d’ailleurs les gens sont en grande majorité contre. Je pense que politiquem­ent, ça va leur coûter très cher à Saint- Irénée, Saint- Just, Trion… Là, ils ne sont pas à Gerland ou à Jean- Macé. C’est pour ça qu’ils prennent beaucoup de temps, multiplien­t les ateliers, les réunions, comme rarement d’ailleurs. Celle organisée au musée Lugdunum s’était mal passée, ce qui explique sûrement qu’ils ne sont pas allés jusqu’au bout de leur logique, mais je pense que le mécontente­ment est toujours là.

D’ailleurs quand ils expériment­eront, les gens se rendront compte de la manière dont ça les impacte et je pense que ça va mal se passer.

Ces aménagemen­ts risquent de pénaliser les personnes âgées, les automobili­stes, les gens du Point- du- Jour ou d’ailleurs qui n’ont pas le choix. La montée du Chemin- Neuf et la rue de l’Antiquaill­e pourraient- elles devenir un gymkhana pour les riverains avec ces nouveaux sens uniques ?

Les écologiste­s partent du principe que les gens vont s’adapter. Mais pour s’adapter, il faut des alternativ­es ; or, tout le monde ne peut pas faire du vélo. Quant aux transports au commun, dans l’Ouest lyonnais on a peu de sites propres, donc les bus sont pris dans la circulatio­n. Ce n’est pas anodin de couper complèteme­nt Saint- Just du Vieux- Lyon et de faire faire aux gens des détours très importants. La fermeture du Chemin- Neuf va avoir des impacts importants sur Choulans, la rue Pierre- Audry… Je pense qu’ils ne mesurent pas l’exaspérati­on des habitants, qui ne faiblira pas.

Comment tout cela peut- il changer la face du 5e ?

Le TEOL reste positif. Mais j’ai encore eu des gens hier qui me disaient qu’ils étaient déçus d’arriver à Montrochet, qui n’est pas tout à fait le centre- ville. Les gens sont restés sur l’idée d’un métro qui les emmènerait à Bellecour. Alors on ne peut pas dire que c’est nul, mais il y a une forme d’insatisfac­tion quand même. Vous imaginez, même sur un tel projet, ils ne marquent pas de points. Et sur les Voies lyonnaises, c’est encore une autre dimension. Quand ils ont vu comment ça crispait sur la no 12, ils vont repousser les autres — comme la traversée du Point- du- Jour — au mandat d’après. »

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