La Tribune de Lyon

Attentat de la rue Victor- Hugo : ce que révèle le juge antiterror­iste

L’hypothèse d’un projet d’empoisonne­ment collectif a été envisagée, selon l’ordonnance de mise en accusation consultée par

- Tribune de Lyon. PAR R. S.

a ville de Lyon a- t- elle été visée par un projet d’empoisonne­ment collectif ? L’hypothèse est évoquée par le juge antiterror­iste qui a instruit l’affaire de l’attentat de la rue Victor- Hugo, perpétré par un individu isolé, le 24 mai 2019, à Lyon ( 2e). Dans son ordonnance de mise en accusation du 12 janvier, que Tribune de Lyon a pu consulter, le magistrat instructeu­r révèle que l’auteur de l’attentat qui a fait long feu s’était renseigné sur la ricine, substance toxique tirée du ricin, plante tropicale cultivée en Asie et en Amérique du Sud. Selon le juge, Mohamed Medjoub avait même acheté plusieurs graines de ricin en avril 2019, un mois avant la confection de l’engin explosif utilisé rue VictorHugo, comme l’attestent des fichiers retrouvés dans son ordinateur par les enquêteurs. Il s’agissait précisémen­t de 98 graines avec une recette pour les transforme­r en poison, précise le journal Le Monde qui a récemment révélé l’informatio­n.

LBoîte de Pringles et guerre civile

Aucune trace de ce poison n’a été relevée sur les débris de la bombe artisanale qui a explosé rue Victor- Hugo. Selon les analyses de la police scient i fique, cet eng i n ét a i t c o n s t i t ué de 250 à 400 grammes de TATP ( explosif communémen­t appelé peroxyde d’acétone, NDLR) fourrés dans une boîte de Pringles, avec 270 projectile­s métallique­s faits de vis et de billes d’acier, le tout avec un système de mise à feu à distance. Le mauvais conditionn­ement du produit a diminué la puissance explosive, ce qui a évité le pire. Treize personnes ont été blessées par les éclats projetés dans la rue piétonne. Rapidement pisté jusqu’à Oullins par les images de vidéosurve­illance, le suspect à vélo a été localisé par l’adresse laissée dans sa commande de piles sur Amazon. L’auteur de l’attentat a affirmé qu’il cherchait à provoquer la panique, plutôt que de tuer des victimes, en espérant déclencher une guerre civile à la veille des élections européenne­s.

Une « imprégnati­on idéologiqu­e ancienne »

« Aucune aide ou complicité extérieure » n’a été mise à jour, relate le juge d’instructio­n. Présumé terroriste solitaire, récemment arrivé dans la région lyonnaise pour rejoindre sa famille, Mohamed Medjoub a fait preuve d’une « imprégnati­on idéologiqu­e ancienne » , selon l’expression du magistrat. Dans son ordinateur codé, les enquêteurs ont retrouvé de « nombreux documents de propagande djihadiste » . Dans ses interrogat­oires, et lors de sérieux incidents en détention, l’accusé a reconnu sa radicalisa­tion sur internet, et s’est présenté sans regret comme un « soldat de dieu » . Aujourd’hui âgé de 28 ans, Mohamed Medjoub est renvoyé devant la cour d’assises spéciale de Paris pour tentative d’assassinat­s en relation avec une entreprise terroriste, ainsi que fabricatio­n, détention, transport non autorisé d’engin explosif en relation avec une entreprise terroriste. L’hypothèse d’un projet d’empoisonne­ment reviendra sans doute dans les débats. L’expertise technique de son ordinateur « a révélé qu’il contenait une documentat­ion dense tant technique qu’idéologiqu­e, notamment sur la fabricatio­n d’engins explosifs et l’emploi du ricin comme poison » , pointe l’ordonnance de renvoi du juge d’instructio­n.

« J’ai vraiment la haine »

Dans ce document, le magistrat souligne ainsi l’enracineme­nt idéologiqu­e du djihadiste, arrivé en France avec sa famille en 2017, dans la banlieue lyonnaise où il passait l’essentiel de son temps sur internet et se montrait plus religieux que le reste du foyer. Si son acte terroriste n’a pas eu l’ampleur souhaitée, Mohamed Medjoub n’en a semble- t- il pas abandonné l’idée, assumant un « combat politique » pour « chasser les Occidentau­x des terres de l’islam et appliquer la loi de Dieu » . En détention, il aurait d’ailleurs continué d’exprimer des idées radicales et violentes. Lors de son dernier interrogat­oire devant le juge d’instructio­n, le 25 avril 2023, il déclarait ainsi : « Si je prends un Français, je vais le couper en mille morceaux, non seulement je vais le décapiter, mais je vais aussi le couper en mille morceaux (…) J’ai vraiment la haine. »

L’accusé a reconnu sa radicalisa­tion sur internet, et s’est présenté sans regret comme un « soldat de dieu » .

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