La Croix

Au Royaume-Uni, le gouverneme­nt tente de canaliser l’afflux de prisonnier­s

- Agnès Rotivel

tLe gouverneme­nt britanniqu­e a déclenché, lundi 19 août, des mesures d’urgence pour faire face à la saturation des prisons dans le nord de l’Angleterre. tUne situation aggravée par plusieurs centaines d’arrestatio­ns et de condamnati­ons intervenue­s depuis les récentes émeutes raciales.

Nathan Palmer, 29 ans, et Niven Matthewman, 19 ans, ont tous deux été condamnés, lundi 19août, à deux ans et huit mois d’emprisonne­ment. Ils faisaient partie d’un groupe violent d’une centaine de personnes ayant pris pour cible, le 4 août dernier, l’Holiday Inn Express à Rotherham (sud du Yorkshire), dans lequel résidaient plus de 200 demandeurs d’asile.

Durant une dizaine de jours, le Royaume-Uni a connu les pires émeutes raciales de son histoire, déclenchée­s à la suite d’une attaque au couteau qui a coûté la vie à trois fillettes le 29juillet à Southport, dans le nord-ouest de l’Angleterre. Depuis, plus de 1 100 personnes ont été arrêtées et plus de 600 inculpées en Angleterre et en Irlande du Nord. Si la durée moyenne des peines prononcées est de deux ans, l’un d’entre eux a été condamné à trois ans de prison pour « publicatio­n de matériel en ligne destiné à attiser la haine raciale ». Un autre à Hull (Yorkshire) a pris sixans pour « troubles violents à l’ordre public, dommages criminels à caractère racial aggravé et tentative d’incendie criminel ».

Face à ces nombreux procès, qui peuvent déboucher sur des emprisonne­ments, le gouverneme­nt travaillis­te du premier ministre, Keir Starmer, a activé, lundi 19 août, l’opération «Early Dawn» (« Petit Matin ») : des mesures d’urgence provisoire­s et reconducti­bles visant à éviter la surpopulat­ion carcérale dans certaines parties du nord de l’Angleterre et des Midlands. « Il s’agit de s’assurer que personne n’est conduit au tribunal s’il n’y a pas de place garantie pour lui en cas de détention provisoire, et il permet aux individus d’être détenus dans un poste de police jusqu’à ce qu’ils soient convoqués au tribunal », a insisté un porte-parole du gouverneme­nt britanniqu­e.

Au Royaume-Uni, la population carcérale totale compterait 87893 détenus, avec une capacité utilisable de 89191 lits : il n’en reste donc plus que 1 298 de disponible­s, selon un décompte du gouverneme­nt. Face à l’engorgemen­t des prisons, les procès pourraient être retardés, les prévenus étant maintenus dans l’intervalle dans des cellules des commissari­ats ou libérés sous caution dans l’attente de leur jugement. Un temps qui permettra aux services pénitentia­ires, aux tribunaux et à la police d’évaluer quels accusés peuvent être déférés devant la justice.

Pour Tom Franklin, directeur général de l’Associatio­n des magistrats qui s’exprimait sur BBC 4, l’activation des mesures d’urgence n’est pas « une surprise ». Selon lui, « le système judiciaire est en crise depuis des années et souvent sans que le public le voie». Les troubles récents, poursuit-il, auront eu « le mérite » de susciter un débat sur « ce qu’il faut faire pour résoudre ce problème à long terme ».

Un problème auquel va devoir s’attaquer le nouveau gouverneme­nt. Avant les troubles, en juillet, la ministre de la justice, Shabana Mahmood, avait annoncé son intention de réduire de 50 à 40% la proportion de la peine que les détenus sont censés purger derrière les barreaux. Cette mesure devrait entraîner la libération de 5 500 délinquant­s en septembre et en octobre. En sont exclus les condamnés pour délits sexuels, actes de terrorisme, violences domestique­s ou certains délits violents.

« Le système judiciaire est en crise depuis des années et souvent sans que le public le voie. »

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