L'Obs

MIROIR, MON GRAND MIROIR

JAMES WEBB, VOYAGE AUX ORIGINES DE L’UNIVERS

- THIERRY NOISETTE

Documentai­re américain de Martin Gorst (2022). 1h28.

« Vertigineu­x », « époustoufl­ant » : dès sa mise en fonction, les scientifiq­ues ont rivalisé d’enthousias­me devant les images du James Webb (ou JWST). Pour construire ce télescope spatial qui a succédé à Hubble, le premier du genre, il a fallu déployer des prouesses inouïes, retracées dans ce documentai­re. Cette mission conjointe de la Nasa et de l’Agence spatiale européenne est la plus complexe depuis l’envoi des hommes sur la Lune : une aventure de plus de trente ans, dont dix-sept de constructi­on, qui a coûté 10 milliards d’euros et mobilisé 10 000 scientifiq­ues et ingénieurs. Dès 1985, avant même le lancement de Hubble, un groupe de chercheurs a commencé à travailler à son successeur. Pour voir loin dans l’espace et ainsi remonter le temps, le futur télescope devait être très grand, et pour cela avoir un large miroir, captant le plus de lumière possible pour révéler des objets presque indécelabl­es. Seulement voilà, aucune fusée n’est assez grande pour emporter une pièce aussi vaste. La solution ? Concevoir un miroir articulé en 18 segments hexagonaux, réglables individuel­lement, et dont les côtés se plient comme des ailes. De même pour le pare-soleil du JWST : de 20 mètres sur 10, il est constitué de cinq couches successive­s en Kapton, un matériau plus fin qu’un cheveu humain et presque aussi solide que l’acier. Pour l’envoyer dans l’espace, il a fallu le plier, puis le déployer en orbite – de loin la partie la plus risquée de l’opération. L’assemblage des composants du James Webb est délicat du fait du nombre et de la sophistica­tion insensée de ses mécanismes (107 pour le seul pare-soleil), certaines pièces nécessitan­t une précision au centième de millimètre. « On n’aura pas de seconde chance » est le leitmotiv des équipes qui ponctue les nombreux tests et répétition­s. A raison : envoyé à 1,5 million de kilomètres de la Terre, quatre fois plus loin que la Lune, le JWST ne pourra pas être réparé en cas de défaut. Cet énorme labeur collectif a été couronné de succès. Quand, en juillet 2022, la Nasa dévoile les premières photos du télescope, la liesse est générale : il nous « ouvre des fenêtres sur une partie de l’Univers qui a été jusqu’ici inatteigna­ble », se réjouit le physicien Christophe Galfard.

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