Les recours contre le Pôle Héloïse, à Argenteuil, rejetés par la justice administrative
Le tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté les deux recours distincts, qui avaient été déposés d’une part par des riverains et des associations locales et d’autre part par le groupe Casino, contre la construction du Pôle Héloïse.
Le 9 août 2019, le préfet du Val-d’Oise avait autorisé la construction de ce « pôle de culture, de loisirs, de commerces et de logements » malgré les deux avis négatifs du commissaire enquêteur sur ce projet controversé situé en zone inondable et porté par le promoteur immobilier parisien Fiminco dirigé par Gérald Azancot : il prévoit « la construction d’une salle de spectacle, d’un cinéma, d’une grande surface commerciale, de 156 logements et d’un parc de stationnement », rappelle le tribunal administratif de CergyPontoise dans sa décision.
L’association Environnement et Cadre de Vie à Argenteuil (Ecva), le comité Jean-Vilar et quatre habitants avaient donc saisi la justice pour censurer ce projet qui prévoit notamment un multiplexe « de 45 mètres de haut » à la place de la salle de concerts Jean-Vilar.
Risques d’inondation
Le groupe Casino, qui exploite un supermarché au centre commercial Côté Seine à 200 mètres du projet, avait fait de même de son côté : il redoute que le Pôle Héloïse vienne « aggraver » le classement de son magasin en zone inconstructible et qu’un « projet d’urbanisme ultérieur » soit « refusé ou limité ».
Pour les associations et les habitants, « le dossier de demande d’autorisation environnementale » comportait des « insuffisances » sur la « description de la nature et du volume de l’ouvrage », au regard des « espaces et espèces faisant l’objet de mesures de protection », comme le « grimpereau des jardins » et le « verdier d’Europe ». D’autres « insuffisances » sur la « quantité de résidus et d’émissions attendus », l’impact sur la « qualité de l’air » et la « quantité de déchets produite » justifiaient également l’annulation de l’arrêté préfectoral, de leur point de vue.
Selon eux, le projet porté par le maire (Lr) d’Argenteuil Georges Mothron présentait aussi des « risques » d’inondation, de rejet de polluants en cas de crues et des « risques technologiques » liés à une possible « surpression » du site Safran Aircraft Engines (exSnecma) de Colombes (Hautsde-Seine). Les « effets cumulés (...) avec d’autres projets » n’avaient pas été pris en compte, alors que des « alternatives » étaient envisageables.
Reste que « les requérants n’établissent, ni même n’allèguent que le projet contesté comporterait un risque suffisamment caractérisé pour des espèces protégées qui aurait justifié que la société pétitionnaire obtienne la dérogation », balaye le tribunal administratif de Cergy-Pontoise dans un jugement en date du 8 février 2024 qui vient d’être rendu public.
L’étude d’impact avait d’ailleurs quantifié « les sources des émissions atmosphériques » et « leur accroissement par les besoins de déplacements générés par le projet ».
Si la qualité de l’air y est qualifiée de « moyenne » à « médiocre », les « concentrations de polluants ne varieront pas de manière significative » et la « hausse du trafic » ne va pas « entraîner de dégradation de la qualité de l’air de la zone ».
« La circonstance que l’étude ne mentionne pas la quantité des déchets prévisible n’a pas eu pour effet de nuire à l’information complète de la population et n’a pas été de nature à exercer une influence sur la décision de l’autorité administrative », pensent aussi les juges. Des « prescriptions » ont d’ailleurs été imposées par le préfet pour qu’un « schéma d’organisation et de suivi des déchets » soit réalisé « en amont ».
Le projet aura bien pour effet de « soustraire 10 300 m2 de surface d’expansion des crues de la Seine », convient le tribunal, mais il va prévoir « une compensation hydraulique » pour la réalisation du parking souterrain « revêtu d’un cuvelage étanche, d’une surface inondable de 18 000 m² et d’un volume de 49 157 m3 permettant le stockage des eaux » et d’une « pompe de vidange » avec « un séparateur d’hydrocarbures ».
Corridor alluvial
Le « transporteur de gaz » avait par ailleurs conclu à une « compatibilité favorable » avec la proximité d’une canalisation de gaz, et la proximité du site de Safran a aussi fait l’objet d’une « série de recommandations » pour que les bâtiments résistent au « phénomène accidentel de surpression ».
Un « diagnostic archéologique » est aussi prévu après « l’obtention du permis de construire » et le projet s’insérera « dans son environnement », confirment aussi les juges. « Le projet est concerné par le corridor alluvial de la Seine, mais en est isolé par la route départementale RD 311, bloquant la circulation des espèces depuis les berges de la Seine », souligne le tribunal administratif de Cergy-Pontoise.
Enfin, si « douze espèces d’oiseaux » ont été recensées, aucune « destruction d’habitats écologiques » n’est induite pas ce projet et les « coupes d’arbres » et les « défrichements » interviendront « en dehors de la période de reproduction des oiseaux ». Le projet se situe au demeurant « pour environ deux tiers de sa superficie en zone (...) urbanisée » et « assez peu touchée par les inondations ». Les différents requérants ont donc été déboutés et devront verser une somme totale de 2 500 € à Fiminco pour ses frais de justice.