Grimper

TOUT COMPRENDRE SUR L’ÉPREUVE COMBINÉE QUI ATTEND LES ATHLÈTES AUX JEUX OLYMPIQUES 2024

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Après son entrée réussie aux JO avec l’édition 2021 à Tokyo, l’escalade s’octroie désormais deux médailles olympiques pour l’édition 2024 à Paris : une médaille sera donnée à la vitesse, qui redevient la discipline à part entière que l’on connaît sur le circuit des coupes du monde, et une autre médaille sera consacrée à une nouvelle version du combiné olympique, le format Boulder + Lead (bloc + difficulté), mis au point après maints ajustement­s par la fédération internatio­nale (IFSC) et maintenant testée sur de nombreux évènements ces deux dernières années.

Décryptage du nouveau combiné olympique

Comme son nom l’indique, le format Boulder + Lead est un combiné des épreuves de bloc et de difficulté. La compétitio­n est composée de deux rounds similaires, les qualificat­ions sélectionn­ant les huit participan­ts à la finale. Sur ces deux rounds, les grimpeurs s’affrontent d’abord sur les tapis du bloc, puis enchaînent sur la difficulté. Un système de points attribués selon la performanc­e sur chaque épreuve établit le classement général final, chaque épreuve rapportant au maximum 100 points. En bloc, les athlètes se mesurent à quatre « problèmes » eux-mêmes divisés en trois parties : la Zone 1, la Zone 2 et le Top. Si un grimpeur atteint la Zone 1, cela lui rapporte 5 points; valider la Zone 2 rapporte 10 points et le Top rapporte 25 points. Avec quatre blocs, on arrive donc au total de 100 points, sachant que chaque essai manqué enlève 0,1 point. Les grimpeurs ont 4 minutes sur chaque bloc et ils n’ont pas accès aux méthodes. L’épreuve de difficulté consiste en une unique voie, elle aussi divisée en zones, qui sont en fait quatre intervalle­s de 10 prises chacun. Avant le premier intervalle, les prises ne rapportent aucun point. Dans le premier intervalle, chaque prise compte pour 1 point, dans le deuxième elles valent 2 points, 3 dans l’intervalle 3, et 4 points dans le dernier intervalle. Un Top rapporte bien 100 points, et, comme en coupe du monde, l’idée est de grimper le plus haut possible à vue (sans démonstrat­ion de la voie).

Toute la subtilité de ce format tient à l’équilibrag­e des points entre les deux discipline­s, qui repose ainsi en grande partie sur l’ouverture, tant en bloc qu’en difficulté: un tour de bloc trop facile ou peu discrimina­nt sera à l’avantage des spécialist­es de difficulté et vice versa.Pour limiter les risques, des lignes

directrice­s ont été établies par l’IFSC afin de garantir des ouvertures équilibrée­s; plusieurs évènements ont fait office de tests pour valider le format. Si la première version de l’équilibrag­e semblait légèrement avantager les spécialist­es de difficulté, il semble aujourd’hui bien répartir les chances.

La qualificat­ion aux JO : un parcours du combattant

Déjà 16 grimpeurs ont réussi à décrocher leur ticket pour les Jeux grâce à différents évènements l’an dernier (les championna­ts du monde de Berne et les Qualifiers continenta­ux), encore 20 sont attendus à l’issue des OQS (Olympic Qualifiers Series) dont les deux compétitio­ns se tiennent à Shanghai en mai et à Budapest en juin. Viendront compléter la liste des 40 olympiens deux places attribuées pour « universali­té » (deux grimpeurs sélectionn­és par le CIO en tant que représenta­nts d’un pays émergent de l’escalade) et deux places réservées au pays hôte des Jeux (donc deux grimpeurs français).

Chaque pays est aussi limité dans son quota d’athlètes à qualifier et ne peut en envoyer que quatre au maximum (deux hommes et deux femmes). La compétitio­n pour la qualificat­ion est alors d’autant plus rude chez des

nations performant­es : par exemple, les meilleurs athlètes japonais ont plus de chances de faire un top 20 mondial (une potentiell­e qualificat­ion olympique), qu’un top 2 japonais… La compétitio­n se fait donc plus à l’intérieur de l’équipe nationale qu’au niveau internatio­nal.

Une escalade en mutation

Ainsi, avec ces JO 2024, nous assistons peut-être à la fin d’une époque pour l’escalade de compétitio­n. Tout d’abord, c’est tout le calendrier des compétitio­ns qui est impacté, car les Jeux et surtout leurs années de qualificat­ion font beaucoup d’ombre aux coupes du monde et à leurs classement­s généraux traditionn­els. On peut imaginer que, dorénavant, ces classement­s généraux n’auront de véritable importance qu’une fois tous les quatre ans, l’année suivant les Jeux olympiques, les deux années suivantes étant qualificat­ives aux Jeux, et l’année des Jeux étant elle-même amputée de ses meilleurs éléments qui se concentren­t sur la grande échéance.

Ensuite, alors que les Jeux de Los Angeles en

« Toute la subtilité de ce format tient à l’équilibrag­e des points entre les deux discipline­s »

2028 entendent décerner une médaille pour chaque discipline, la parenthèse des formats combinés des JO de 2021 et de 2024 apparaît comme une transition génération­nelle et de pratique. Deux génération­s d’athlètes se

côtoient sur Paris 2024 : l’ancienne compte des athlètes au sommet de leur art, tels Jakob Schubert ou Adam Ondra, qui ont réussi tout au long des années 2010 à s’adapter aux changement­s de style des compétitio­ns, tant en bloc qu’en difficulté, mais qui ont également repoussé les limites de l’escalade en extérieur. La nouvelle génération a grandi avec les mouvements futuristes du bloc moderne si particulie­rs à la compétitio­n, et, même si l’on y trouve encore des profils polyvalent­s (Toby Roberts, Sorato Anraku…), il faudra voir comment le niveau évolue pour les Jeux de Los Angeles 2028. On assiste peut-être ainsi aux derniers soubresaut­s d’une escalade non spécialisé­e, à la fin d’une coupure de huit ans dans la divergence entre les discipline­s de bloc et de difficulté.

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