COMPARATIF ABARTH 124/MX-5 RF/GT86
Avec un niveau de puissance jamais atteint jusqu’ici, est-ce que la nouvelle Mazda MX-5 de 184 ch peut affronter sans honte l’abarth 124 Spider à moteur turbo et la Toyota GT86 de 200 ch ? Une virée à trois s’impose pour le découvrir.
Vous détestez les mastodontes actuels surpuissants? Ça tombe bien, voici le comparatif ultime entre trois engins légers conçus exclusivement pour le plaisir, un coupé, un cabriolet à capote souple et un cabriolet à toit amovible. Faites votre choix.
Cela vaut bien une célébration. Elles sont là, parées pour une virée sur les plus belles routes de la région: trois sportives, trois propulsions à boîte manuelle, toutes pesant moins de 1300 kg voire beaucoup moins. Deux d’entre elles abritent aussi un moteur atmosphérique et, pour couronner le tout, elles restent encore relativement abordables. Oui, vous l’avez compris, nous avons réuni la MX-5 récemment restylée et deux de ses plus proches rivales, soit trois engins fournissant une énorme quantité de fun à leurs occupants, et tout ça pour moins cher qu’un Renault Koleos un peu équipé. Pour ce test, nous avons choisi la version RF à toit en dur rétractable du roadster Mazda, le GT86 qui reste un coupé classique, et la 124 Spider à capote souple, soit les trois variantes possibles pour ce segment étroit. Ces modèles ont déjà été opposés par le passé, la GT86 avait éclipsé l’ancienne mouture du MX-5 RF et, si la Fiat 124 Spider avait perdu son match face à la Mazda, la déclinaison Abarth plus punchy n’avait jusque-là jamais rencontré ses adversaires du jour.
Sur le papier, les améliorations apportées au 2,0 litres de la MX-5 répondent à la plupart des critiques exprimées au sujet de la première version. Jusqu’ici, nous étions en droit de préférer la petite 1,5 litre plus rageuse, mais l’annonce d’une zone rouge relevée de 500 tr/mn, de 24 ch supplémentaires et d’un moteur plus expressif semble combler les manques. L’une des réussites de Sergio Marchionne à la tête de FCA fut de négocier un accord de partenariat avec Mazda afin de pouvoir profiter de la base de la nouvelle MX-5 et la transformer en une 124. Le 2,0 litres atmosphérique japonais était remplacé par le 1,4 litre turbo maison qui offrait notamment une belle dose de couple supplémentaire (250 Nm contre 205 à la Mazda), en plus d’un petit surplus de puissance (170 ch contre 160). Pour schématiser, hormis son moteur turbo, un soupçon de rigidité en moins et une capote qui se manoeuvre avec les muscles plutôt qu’avec un bouton, la 124 est identique à la MX-5 RF.
Puis, nous avons la GT86, toujours aussi controversée, ici dans une livrée bleue spécifique à la série Racing Blue qui se pare également de jantes de 17 pouces et d’un aileron noirs, de freins Brembo et d’amortisseurs revus. Elle est toujours animée par le flat-4 Subaru atmosphérique tout alu de 2,0 litres et 200 ch qui réclame qu’on le pousse à 6400 tr/mn pour atteindre son pic de couple de seulement 205 Nm. En d’autres termes, il faut l’essorer pour qu’il s’exprime et devienne sportif.
Au registre pécuniaire, si la série spéciale Racing Blue est affichée à 38 200 euros aussi bien en boîte manuelle qu’automatique, la version standard de même puissance débute à 32 490 euros en boîte manuelle. Vu le malus de 8 173 euros dont elle écope, cela peut légitimement faire réfléchir. La Mazda MX-5 RF voit quant à elle son tarif débuter à 35 350 euros auxquels il faut rajouter 2 453 euros de malus. Pour bénéficier des amortisseurs Bilstein comme ici (en plus des Recaro et des barres antirapprochement), il faudra souscrire l’option Pack Performance à 1800 euros.
COUPÉ, TOIT EN DUR, CAPOTE SOUPLE, NOUS DISPOSONS DE TOUTES LES VARIANTES DE SPORTIVES POSSIBLES
La surprise vient de l’abarth 124 Spider qui a vu sa gamme remodelée avec la sortie d’une version épurée affichée à 34 500 euros (+ 1 373 euros de malus), ce qui en fait le modèle le plus abordable des trois à ce jour. La version Turismo équipée entre autres des freins Brembo et de l’échappement Monza réclame 37 500 euros.
Sur le papier, ce trio n’est pas spécialement bien équipé pour jouer les fiers à bras dans les lignes droites. L’abarth et la MX-5 demandent 6’’8 pour abattre un 0 à 100 km/h alors que, selon les chiffres officiels, la GT86 réclame un peu plus de temps avec un chrono de 7’’6. Ses 200 ch n’effacent pas le fait qu’elle est aussi la plus lourde avec 1 240 kg sur la balance. Ou plutôt, il est plus juste de dire qu’elle est la moins légère car il faut reconnaître à Mazda le mérite d’avoir consciencieusement traqué le dernier kilo durant le développement de la MX-5 ND, ce qui lui permet de ne peser que 1073 kg malgré un toit en dur électrique (l’abarth à capote souple est 13 kg plus légère).
Au début, c’est l’abarth qui semble la plus rapide des trois car elle requiert moins d’effort pour atteindre les mêmes vitesses que ses rivales. Sans doute est-ce dû à son niveau de couple disponible à mirégime, supérieur aux autres. Elle est aussi celle qui s’exprime le plus avec quantité de pétarades entre 3 500 et 5 500 tr/mn et un régime de ralenti guttural qui rappelle quelques barques surmotorisées. En comparaison, les autres sont quasiment aphones, tout du moins jusqu’à ce que vous écrasiez la pédale de droite. Toutefois, en dépit de cette entrée en matière auditive spectaculaire, le Spider se révèle aussi le plus souple et le plus paresseux des trois, et plus vous forcez l’allure avec lui, plus cela devient évident. L’abarth offre un plaisir simple et accessible. Parfois son comportement un peu approximatif devient une source de satisfaction pour le pilote qui a le sentiment de devenir un héros en cherchant à dompter le petit roadster. L’inverse est également vrai avec la GT86 et, dans une moindre mesure, la MX-5:
DÈS LE DÉPART, L’ABARTH PARAÎT NETTEMENT PLUS RAPIDE QUE LES DEUX AUTRES
plus vous poussez et meilleures elles sont. Spécialement la Toyota. Ce coupé propose toujours quelque chose de profondément juste. Pour les débutants, elle a une gueule, notamment dans cette livrée bleue. Avant même de grimper à bord, cela procure d’emblée le sentiment qu’elle est plus sportive que les deux autres. Et cette impression s’accentue une fois installé.
Le siège conducteur vous maintient fermement (contrairement à ceux de l’abarth et de la Mazda qui manquent de soutien au niveau des épaules) et vous êtes également assis plus bas que dans les deux autres. La sensation de sportivité s’en trouve encore une fois améliorée. Idem pour les commandes, le volant, le levier de vitesse et le pédalier juste parfait. Dans la Mazda et l’abarth, les pédales (identiques) n’aident pas à jouer du talon-pointe avec un accélérateur positionné trop bas par rapport au frein. Heureusement, le volant de la MX-5 est réglable, de sorte que les plus grands trouveront plus facilement une bonne position de conduite qui leur permettra de mieux exploiter le potentiel et les talents considérables de cette Japonaise.
Ces détails, qui se perçoivent avant même d’avoir lancé les voitures à l’assaut de nos routes préférées pour les comparer, font au bout du compte déjà une grande différence. Mais il est temps maintenant de découvrir si : a) l’abarth est réellement la plus rapide; b) si la MX-5 reste une sportive ou si elle a muté en quelque chose d’autre; et c) si la GT86 a le moteur pour rivaliser avec les deux autres. C’est dans l’abarth que je débute mon comparatif et découvre une étrange voiture. Sa suspension se montre étonnamment souple et absorbante, sa direction n’a rien de très vif et elle freine… normalement. Rien ne dénote sur la route, son moteur impressionne vraiment et pousse fort, accompagné d’une sonorité enivrante qui se poursuit jusqu’en quatrième. Et la boîte manuelle fonctionne très correctement. Mais il y a une certaine forme d’imprécision dans son comportement qui la rend étrangement insipide sur ces petites routes. L’expérience de conduite apparaît alors très commune, sans supplément d’âme. Vous ne pouvez pas profiter pleinement de son poids plume et, du fait qu’il s’agit d’une propulsion, elle semble n’être qu’une voiture normale habillée en sportive. Décevant. S’il s’agissait de la Fiat 124 Spider, cela serait compréhensible (et pardonnable) car sous ce blason, elle ne cherche qu’à être une auto facile à vivre, mais là on s’attend à un peu plus de peps et de fun. Les deux autres sont différentes. Nettement.
LE MEILLEUR CHOIX ICI, C’EST LA GT86. ET DE LOIN
La MX-5 se montre tout de suite plus engageante à piloter, plus sportive dans son comportement, et ce même si les similarités avec l’abarth sont nombreuses. Position de conduite, commandes, tout l’habitacle semble identique, au badge près en fait. En action, la MX-5 se révèle aussi beaucoup plus alerte et vive, la suspension un peu plus ferme qui autorise quand même un étonnant roulis la rend plus précise à l’inscription. La direction semble du coup plus réactive et plus consistante tandis que la pédale de frein de la Mazda répond immédiatement, contrairement à celle du Spider.
Au final, malgré une courbe de couple moins favorable à mi-régime, vous vous sentez plus connecté à la MX-5. Il faut grimper plus haut dans les tours pour qu’elle offre le meilleur mais c’est aussi cela qui la rend plus engageante d’autant plus que, dans ces conditions, la boîte se montre plus douce et plus rapide que celle de l’abarth. Le seul “souci” est qu’une fois au bout de la route, vous vous dites que vous referiez bien le parcours mais avec le toit replié pour entendre la jolie tonalité sportive du moteur. Même si l’on parvient aisément à attaquer ou à la faire glisser dans tous les virages, je ne vais pas affirmer ici que l’on atteint le Nirvana automobile au volant de la MX-5, non, il lui faudrait pour ça bien plus que les 24 ch supplémentaires qui ne font objectivement guère de différence. Reste qu’il s’agit d’une auto dont vous descendez avec le sourire après quelques kilomètres parcourus sur une belle route. Elle fait le job et prouve après l’abarth que les détails que l’on juge parfois mineurs sont toujours importants pour donner un caractère sportif (ou non) à une auto. Mais la seule auto ici qui va satisfaire l’amateur de sensations fortes derrière un volant, c’est la GT86. Son flat-4 doit être cravaché en permanence pour parvenir à faire vivre correctement tout le reste. Direction, châssis, freinage ne produisent leur meilleur qu’à cette
condition, et c’est ce qui fait tout l’attrait de cette Toyota. Il faut lui “rentrer dedans” aussi fort que possible pour qu’elle montre son vrai visage. Plus vous la poussez, meilleure elle est. Elle en devient même plus naturelle.
Au point de douter du choix de la doter de pneus de Prius délibérément dégueulasses! Lui offrir une suspension améliorée pour ensuite la poser sur des pneus sans grip reste un mystère pour moi. Mais malgré cela, je pense que la GT86 est assurément la plus amusante des trois sur ces routes fantastiques.
De n’importe quelle façon, la GT86 reste le meilleur choix ici, et de loin. Son châssis joue dans la division supérieure lorsqu’il s’agit de vous abandonner à quelques errements sur les routes publiques. Elle est vive mais indulgente, transparente dans ses réponses mais également infiniment maniable. La direction de la Toyota se montre aussi plus douce et plus informative que les autres et sa boîte est une vraie merveille. Ce n’est pas plus mal puisque vous devez l’utiliser nettement plus souvent que dans L’abarth, mais cela fait partie du fonctionnement normal de la GT86, un fonctionnement qui vous amène à tutoyer des niveaux inédits de plaisir sur de telles routes. Et pour ne rien gâcher, elle a aussi des sièges arrière et un coffre plus volumineux. Au final, la Toyota remporte le match plutôt facilement. Tout du moins tant que vous ne désirez pas rouler les cheveux au vent. Dans ce cas, la MX-5 demeure la référence qu’elle a toujours été, tandis que l’abarth déçoit légèrement. Certains ne seront peut-être pas d’accord, mais ce qu’est la GT86, elle doit le rester à jamais.