Pourquoi une avocate a alerté le liquidateur
Inscrite au barreau de Paris, Domitille Brevot est avocate en procédure collective (sauvegarde, redressement ou liquidation judiciaire). Elle défend l’un des créanciers en litige avec Escaliers de France. Et une requête, signée de sa main, était prête à être envoyée vendredi 16 février : elle souhaite être désignée contrôleur de la procédure ouverte à Évreux.
« Cela permet d’avoir accès à plus d’informations, développe-t-elle. Et le contrôleur, dans l’hypothèse où le liquidateur et/ou le procureur ne diligenterait pas d’action en responsabilité contre le dirigeant, peut se substituer et agir en sanctions, c’està-dire que je peux assigner M. Moutardier en interdiction de gérer, qui peut aller jusqu’à quinze ans, et/ou en paiement du passif qu’il a contribué à créer. »
L’interdiction de gérance, «on a de grandes chances d’y parvenir, pense Domitille Brevot. Pour le comblement du passif sur ses deniers personnels, encore faut-il qu’il soit solvable, et ce n’est pas du tout certain qu’il le soit. »
L’avocate espère qu’une véritable enquête sera menée « par le liquidateur et/ou le procureur » afin d’identifier d’autres potentiels responsables. « Je pense que M. Moutardier n’est pas tout seul et il faut démontrer que des complices l’ont aidé à réaliser cette escroquerie », répond Me Brevot. « Si on arrive à le prouver, on peut faire condamner le dirigeant de droit, mais aussi le ou les dirigeants de fait», ajoute-t-elle.
Plusieurs appels reçus ces dernières semaines ont interpellé l’avocate. Yvon Moutardier continuerait-il d’agir depuis le placement en liquidation de son entreprise en octobre 2023 ? « Il démarche d’anciens clients d’Escaliers de France, au nom d’une autre société, ce qui est interdit par la procédure collective et interdit pénalement », abonde-t-elle. De tels agissements pourraient s’apparenter à un « détournement de clientèle ».
Le 5 février, Domitille Brevot a alerté le liquidateur, déjà prévenu à la mi-janvier par Hélène Barbot. « M. Moutardier a recontacté, depuis le début de cette année, des gens qui n’avaient versé que 40 % d’acomptes au moment des commandes et promet de poser les escaliers contre paiement du solde de la facture, embraye la retraitée à la tête du collectif de plaignants, en s’appuyant sur des cas concrets qui lui ont été rapportés. Il dit qu’il travaille en tant que commercial pour une autre entreprise ».
Celle-ci est basée à Ombréed’Anjou, dans le Maine-et-Loire. Aucun repreneur d’Escaliers de France n’a été désigné et le liquidateur a demandé à plusieurs reprises à la société en question de cesser toute démarche commerciale à l’égard des clients concernés. Contacté, l’un des responsables de cet établissement a refusé catégoriquement de répondre à nos questions.