Un arbre tricentenaire remarquable au centre de Gisors
Un platane gigantesque labellisé arbre remarquable se cache dans ce jardin au coeur de Gisors. Depuis qu’il est propriétaire de l’Hôtel de Mézières, Emmanuel Bois se passionne pour l’histoire de cet arbre et des lieux.
Pas besoin de s’éloigner du centre-ville de Gisors pour admirer cet arbre exceptionnel et le jardin intimiste qui l’abrite. Entre les boutiques animées et restaurants de la rue Cappeville, les grilles de l’Hôtel de Mézières s’ouvrent sur la cour d’une maison style Louis XV. En traversant la demeure, on arrive « côté jardin », comme le dit Emmanuel Bois, le propriétaire. C’est là qu’on découvre un majestueux platane, vieux de plusieurs centaines d’années. « Les experts lui donnent au moins 250 ans. Certains estiment qu’il a plus de 300 ans», raconte ce passionné.
Arrivé dans la maison en 2019 avec son compagnon, Emmanuel Bois a tout de suite vu que cet arbre gigantesque était particulier. « Nous avons contacté l’association Arbres remarquables, qui est la seule organisation à pouvoir décerner le label en France. La remise de prix a eu lieu en juillet 2022 par le président de l’association, Georges Fetermen ». Ce titre permet de protéger l’arbre : il ne pourra jamais être abattu, même si d’autres personnes achètent le terrain par la suite.
Soigné par le jardinier de Versailles
Environné de buis âgés, eux aussi de plus de 200 ans, le platane a été planté sous la régence de Louis XIV. « Il n’a pas toujours été bien entretenu, alors nous avons recours à un spécialiste pour le garder en bonne santé », poursuit le propriétaire, «il le taille tous les deux ans environ ». Le jardinier spécialiste travaille aussi dans les jardins du château de Versailles.
D’une circonférence proche des neuf mètres, et d’une hauteur de près de quarante mètres, l’arbre est particulièrement imposant. «Je m’occupe moimême de l’entretien du reste du jardin, mais le platane a besoin de soins particuliers ». Emmanuel Bois n’utilise pas d’engrais, ce qui lui permet de faire de belles rencontres animales. « On voit des bestioles partout : insectes, batraciens, hérissons… En plein coeur de Gisors ! »
Fief des archevêques de Rouen
Si le jardin et surtout son gigantesque platane sont exceptionnels, la maison ne l’est pas moins. Bâtie en 1757, la demeure a connu une histoire riche, et a vu le passage de personnalités de renom. « C’était l’une des résidences des archevêques de Rouen», souligne le féru d’histoire, « c’est sûrement l’un d’eux qui a fait planter le platane pour avoir de l’ombre ».
Quand l’archevêque n’était pas à Gisors, un chanoine (civil) gardait la maison. Le dernier à avoir occupé ce poste, juste avant la Révolution française, était le Marquis de Mézières. « C’est pour cela que les lieux sont aujourd’hui appelés “Hôtel de Mézières”. C’est la tradition. »
Le séjour de Madame Royale
L’anecdote historique qui fait la fierté des propriétaires reste le séjour d’une personne de sang royal entre les murs de la demeure : Marie-Thérèse de France, premier enfant de Louis XVI et Marie-Antoinette, surnommée Madame Royale. «C’est la seule de leurs enfants à avoir survécu à la Révolution française. Elle a été reçue ici le 17 juin 1828 et y a passé une nuit ». À la fin de son séjour, elle a laissé une lettre au maire de Gisors de l’époque. Elle y écrit qu’elle a « beaucoup apprécié avoir pris le frais sous le grand arbre».
Une phrase significative pour Emmanuel Bois. «On ne sait pas si elle parlait de l’ombre du platane ou d’une boisson fraîche prise sous l’arbre, mais il est sûr qu’il était déjà là. Et déjà grand ! »
La maison a toujours été
« l’une des plus tenues et des plus cossues des environs. Elle a été la première de Gisors a avoir l’électricité ». Avec des travaux de rénovation, les propriétaires espèrent redonner à ce lieu historique sa superbe.
«Nous avons eu l’accord du ministère de la Culture pour refaire les façades très bientôt ». Le toit du pavillon et la terrasse seront aussi rénovés.
Autre projet : celui d’ouvrir occasionnellement les lieux aux visiteurs. «Nous l’avons fait en juin pour l’événement les Mains vertes du coeur, au bénéfice de l’association Charles-Nicolle. C’était très intéressant donc nous recommencerons ».
Le public averti et les gens de passage pourront découvrir les multiples autres anecdotes de ces passionnés d’histoire, et contempler la majesté d’un arbre qui « nous survivra », comme le dit son protecteur.