Notre Système solaire, résultat d’un fameux coup de dés cosmique
Tous ceux qui pensent que nous sommes très spéciaux vont se réjouir de notre chance cosmique. « Nous » signifiant ici la Terre, le Système solaire, et même notre étoile Soleil. Une assertion à faire se retourner Copernic dans sa tombe ! D’autant qu’elle ne vient pas de n’importe qui, mais de l’astronome Alessandro Morbidelli, qui a donné jeudi 25 janvier sa leçon inaugurale au Collège de France (Paris), en tant que titulaire de la chaire « Formation planétaire : de la Terre aux exoplanètes ». Selon ce spécialiste de mécanique céleste, l’observation desdites exoplanètes « débanalise notre Système solaire ». Rien de moins. A ceux qui auraient une absence, on rappellera que depuis le xvie siècle et la révolution scientifique causée par De revolutionibus orbium coelestium du célèbre astronome polonais susnommé, on s’était fait à l’idée que la Terre n’était pas le centre du monde. Certes. A l’instar de ses consoeurs planétaires, elle tourne autour du Soleil. Du nouveau aujourd’hui ? C’est que l’agencement de cette majestueuse cohorte – Mercure, Vénus, Terre, Mars, Jupiter, Saturne… – dont notre planète bleue, avec océans et atmosphère protectrice, est bel et bien due à un hasard… fort heureux pour nous ! En termes plus scientifiques, les modélisateurs nomment cela stochasticité. C’est effectivement l’étude des planètes tournant autour d’autres soleils qui a tout bouleversé. Avec 51 de Pégase, la première jamais découverte, en 1995, les terriens étaient déjà bouche bée à l’idée que de tels objets célestes existaient ailleurs, autour d’autres étoiles – notre galaxie en compte 100 milliards ou plus, parmi une centaine de milliards d’autres galaxies. Maintenant, ont été repérées plus de 5 500 exoplanètes, des Jupiter chauds, des superterres… Mais l’important est encore ailleurs. Dans la découverte de situations extraordinaires, telles ces géantes orbitant à vitesse monstre au ras de leur étoile. Wasp-69b, par exemple, aussi grosse que Jupiter, qui prend de plein fouet le rayonnement stellaire au point d’exhiber telle une comète une queue de dégazage de 500 000 kilomètres, effectue sa révolution en quatre jours terrestres seulement ! Devant pareil phénomène, les astrophysiciens ont révisé leurs calculs et sont tombés d’accord sur le fait qu’au sein du disque de matière dans lesquelles elles s’agrègent, les planètes sont instables et connaissent des migrations. Résultat de nouvelles simulations numériques menées sur la formation et l’évolution de notre propre Système solaire ? Avant qu’il se soit équilibré dans sa configuration actuelle, la probabilité qu’il s’organise tel qu’il est a été évaluée à un petit… 5 %. Aucun déterminisme, plutôt un fameux coup de dés cosmique. Avec en bonne place notre « pale blue dot », minuscule point bleu dans l’Univers, ainsi que Carl Sagan nommait la planète Terre. Alessandro Morbidelli estime que d’un point de vue philosophique et épistémique, « il est intéressant d’y réfléchir ». On en conviendra à 100 %.•