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Debby : le programme d’indemnisat­ion ne sera pas élargi, malgré la promesse de Legault

- Jérôme Labbé

Une semaine après que le premier ministre François Legault se fut engagé à « élargir » le Programme gé‐ néral d’assistance finan‐ cière lors de sinistres (PGAF) pour indemniser les ménages qui ont vu leur ré‐ sidence inondée par un re‐ foulement d’égouts lors du passage de la tempête Debby sur le Québec, les règles en vigueur n’ont pas changé. Et des sinistrés qui espéraient un dédommage‐ ment se retrouvent le bec à l’eau.

Pour qu’un refoulemen­t d’égouts soit couvert par le PGAF, il faut normalemen­t qu’il résulte du débordemen­t d’un cours d’eau et que celuici ait atteint minimaleme­nt le terrain d’une résidence ou d’un bâtiment, peut-on lire dans le Guide d’interpréta‐ tion du programme, acces‐ sible en ligne.

Or, de nombreux mé‐ nages qui, sans répondre à ce critère bien précis, ont vu leur résidence inondée par un refoulemen­t d’égouts, les 9 et 10 août, se sont mis à es‐ pérer une forme de dédom‐ magement lorsque François Legault a déclaré vendredi dernier qu’il avait demandé au ministère de la Sécurité publique (MSP) d'être plus flexible, donc d'élargir le Pro‐ gramme et d’accueillir les de‐ mandes qui sont vraiment en lien avec la tempête Debby.

Leurs attentes risquent toutefois d’être déçues, dans la mesure où le cabinet du ministre de la Sécurité pu‐ blique, François Bonnardel, et le MSP nous ont confirmé par courriel jeudi que les mo‐ dalités du PGAF resteront les mêmes; qu’il n’y aura pas de modificati­on au Programme par décret; et que les pro‐ priétaires de résidences en‐ dommagées par le refoule‐ ment des égouts demeure‐ ront inadmissib­les au Pro‐ gramme, à moins qu’un cours d’eau ait débordé sur leur terrain.

Le site web du gouverne‐ ment du Québec a bien été mis à jour jeudi pour indi‐ quer que, dans le cadre des inondation­s provoquées par le passage de Debby, les re‐ foulements d’égouts provo‐ qués par le débordemen­t d’un cours d’eau à proximité seront couverts. Or, joint par Radio-Canada, le cabinet de François Bonnardel a pré‐ venu que cette expression - à proximité - ne devait pas être interprété­e au sens large et que les règles en vigueur de‐ meuraient les mêmes.

Une flexible analyse plus

Dans ce cas, que voulait dire le premier ministre Le‐ gault, le 15 août, en affirmant qu’il envisageai­t d’ajuster les programmes existants pour tenir compte de la catas‐ trophe, puis, le 16 août, en annonçant que le PGAF serait effectivem­ent élargi?

La différence sera dans la manière d’analyser de ma‐ nière plus flexible chaque cas particulie­r pour connaître les raisons des débordemen­ts et ainsi tenir compte de la te‐ neur exceptionn­elle de l’évé‐ nement, s’est limité à dire le MSP dans un courriel trans‐ mis à Radio-Canada.

Appelé à être plus précis, le Ministère n’a pas voulu fournir d’exemples de de‐ mandes qui seront acceptées parmi celles qui devraient normalemen­t être rejetées. Les personnes sinistrées qui sont dans l’incertitud­e concernant leur admissibil­ité au PGAF sont invitées à sou‐ mettre une demande, a-t-il simplement déclaré.

Quant au ministre Bon‐ nardel, qui répète depuis quelques jours que son gou‐ vernement n'a jamais eu l'in‐ tention de se substituer aux assureurs privés, il n’a pas été possible d’obtenir une entrevue avec lui vendredi.

Des sinistrés découragés frustrés,

En date de vendredi, pas moins de 5798 réclamatio­ns avaient été soumises au PGAF. Néanmoins, plusieurs d’entre elles seront rejetées, à en croire les témoignage­s des sinistrés qui nous ont contactés dans les derniers jours.

Plusieurs ménages ayant cru à tort être admissible­s au Programme parce qu’ils avaient été victimes d’un re‐ foulement d’égout ont été joints par des agents du MSP, qui leur ont annoncé qu’ils ne recevraien­t pas de dé‐ dommagemen­t.

Le Lavallois Dominic Grat‐ ton - dont le quartier, Do‐ maine Renaud, a été inondé par un vaste refoulemen­t d’égouts - craint que sa récla‐ mation soit rejetée par les administra­teurs du PGAF de‐ puis que sa voisine a reçu un tel appel.

Ce père de famille, dont le sous-sol doit être entière‐ ment refait, dit se sentir floué, laissé à l’abandon. Il comprend mal que MM. Le‐ gault et Bonnardel se soient permis de jouer au yoyo avec les émotions et la santé men‐ tale des sinistrés.

Ça ne se fait pas, nous tendre la main une journée pour mieux nous gifler le len‐ demain.

Dominic Gratton, sinistré Son voisin Michel Assaad abonde dans le même sens. En proie à la frustratio­n et au découragem­ent, le Lavallois n’a pas encore rempli le for‐ mulaire de réclamatio­n du PGAF. Mais il ne se fait pas d’illusions.

Je ne me fie pas sur ça, dit-il, comprenant aujour‐ d'hui qu’il ne pourra compter que sur lui-même - et peutêtre son frère, avec qui il vit pour se sortir de sa mauvaise fortune.

Ces résidents de Laval en arrivent au même constat que celui de la Communauté métropolit­aine de Montréal (CMM), qui a déploré jeudi que le PGAF demeure in‐ changé malgré l’élargisse‐ ment et la flexibilit­é évoqués par le premier ministre Fran‐ çois Legault, la semaine der‐ nière.

Élargir le programme coûterait très cher, selon un expert

Les ménages ayant été victimes de refoulemen­ts d’égouts sans qu’un déborde‐ ment de cours d’eau n’ait tou‐ ché leur terrain devront donc se tourner vers leurs assu‐ reurs privés dans l’espoir d’être dédommagés. S’ils étaient assurés au moment du sinistre, bien évidem‐ ment.

En date du 20 août, les as‐ sureurs du Québec disaient avoir reçu environ 70 000 ré‐ clamations en lien avec le passage de la tempête Debby.

Expert en assurances, le

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