La stratégie de Québec solidaire mise en doute par Émilise Lessard-Therrien
L’ancienne co-porte-parole de Québec solidaire (QS) Émilise Lessard-Therrien croit que les problèmes du parti sont « systémiques » et dépassent la personna‐ lité de Gabriel Nadeau-Du‐ bois.
C’est ce qu’elle affirme dans la première entrevue qu’elle accorde depuis l’an‐ nonce sur les réseaux so‐ ciaux de sa démission le 29 avril dernier.
Gabriel, c’est un parle‐ mentaire extraordinaire, il s’investit énormément, fait plein de sacrifices lui-même, mais il est arrivé avec sa garde rapprochée, raconte-telle au micro de David Cha‐ bot à l’émission Des matins en or.
Celle qui a été députée de Rouyn-Noranda-Témisca‐ mingue de 2018 à 2022 ajoute par contre avoir res‐ senti une absence de compli‐ cité avec M. Nadeau-Dubois.
Il n’y a pas beaucoup d’es‐ pace pour challenger la vi‐ sion et la stratégie. On peut se poser la question : est-ce qu’elle donne des résultats? Et la réponse qu’on peut se formuler depuis 5 ans, c’est que les stratégies employées, elles ne donnent pas de ré‐ sultats, soutient Émilise Les‐ sard-Therrien, qui raconte aussi s’être sentie seule, no‐ tamment parce qu’elle n’avait pas d’attaché politique.
Quand tu n’as pas de bras droit, personne pour réflé‐ chir en amont, pour tester des idées, pour valider des intuitions, pour aller cher‐ cher de l’information supplé‐ mentaire, rapidement, je me suis sentie isolée, explique-telle.
Ça devient une question de choix, ajoute Émilise Les‐ sard-Therrien. Ce sont les choix que le parti, que la di‐ rection politique a faits. On aurait pu faire des choix dif‐ férents pour que je sois mieux soutenue, mieux ac‐ compagnée, par exemple.
Un retour dans la sphère publique, mais pas en politique partisane
Après avoir complète‐ ment quitté la sphère pu‐ blique, les médias et les ré‐ seaux sociaux, Émilise Les‐ sard-Therrien prononcera un discours de la fête nationale en compagnie de Sol Zanetti et Catherine Dorion au Centre plein air Lac Simon dans Portneuf.
Ça va bien, ça va mieux, indique Émilise Lessard-Ther‐ rien, qui a vécu un épuise‐ ment professionnel avant de remettre sa démission.
Au moment de me retirer, je pleurais plein de fois par jour. Quand tu arrives à la maison et que tu vois tes en‐ fants qui sont là et que tu n’es plus capable de faire la connexion, que je leur lis une histoire et je ne suis pas ca‐ pable de la finir parce que c’est trop difficile, tu te dis : "Pourquoi je fais ça?" Moi, je ne me réalise pas, ça ne me nourrit pas, avec émotion.
Si je n’avais pas eu d’en‐ fants, probablement que ça aurait été différent et, en même temps, je ne veux pas envoyer le message que la
raconte-t-elle politique, ce n’est pas pour les jeunes parents.
Émilise Lessard-Therrien Émilise Lessard-Therrien avait été élue à titre de porteparole féminine en no‐ vembre. Elle démissionnera quelques mois plus tard.
Les gens me disent : "Tu n’as pas duré longtemps". Oui, mais quand on fait tous les sacrifices, des fois c’est des 8-9 jours partie de la maison. On ne voit pas les enfants, on ne rentre pas à la maison le soir avec la chaleur familiale pour recharger ses batteries. Ça épuise vite et c’est la perte de sens, dit-elle.
Mme Lessard-Therrien re‐ trouve peu à peu la fougue et le désir de s’indigner, cepen‐ dant, elle ferme la porte à un retour en politique active aux prochaines élections en 2026, mais elle admet que c’est dur de dire jamais pour la suite.
Je vais vraiment prendre une vraie pause de politique partisane. J’ai le goût de continuer d’être une voix pour parler des enjeux de la ruralité, des enjeux des ré‐ gions.
Le legs d’Émilise Les‐ sard-Therrien
Même si son passage comme co-porte-parole aura été court, elle se dit fière du travail accompli.
Sa démission fracassante aura créé une crise au sein de QS, forçant Gabriel Na‐ deau-Dubois à prendre une pause de quelques heures pour réfléchir à son avenir et les militants à revoir les posi‐ tions du parti.
Mon départ a quand même fait oeuvre utile, je pense, parce que ça a mis les militants en action. Il y a eu des débats, il y a eu des dis‐ cussions. Toute une réflexion plus largement aussi sur la place qu’on fait aux femmes en politique, etc. Ça a libéré une parole, tout ça n’est pas en vain, conclut Émilise Les‐ sard-Therrien.