Les promoteurs privés en éolien veulent plus de détails d’Hydro-Québec sur leur avenir
Des promoteurs privés en éolien ont encore de nom‐ breuses questions sur leur place dans le développe‐ ment de la filière, après qu'Hydro-Québec a an‐ noncé vouloir devenir le maître d'oeuvre des futurs grands projets.
Plus de 200 représentants du secteur des énergies re‐ nouvelables étaient rassem‐ blés dans le cadre du Col‐ loque sur les énergies renou‐ velables à Carleton-sur-Mer organisé par le Centre de re‐ cherche en énergies renou‐ velables Nergica.
La présentation de Ma‐ thieu Johnson, vice-président stratégies et développement pour Hydro-Québec, a no‐ tamment été suivie avec beaucoup d’attention par les participants de la filière éo‐ lienne.
Les promoteurs privés de projets éoliens ont soulevé de nombreuses préoccupa‐ tions face à leur futur rôle dans le développement de la filière au Québec, après l’an‐ nonce récente par HydroQuébec de sa volonté de prendre le contrôle de cette filière.
La société d'État veut tri‐ pler la production d'éolien au Québec d'ici 2035 et ajouter 10 000 mégawatts avec de gros parcs éoliens. HydroQuébec
veut aussi devenir maître d'oeuvre et actionnaire de tous les projets éoliens de plus de 1000 mégawatts.
Le président du conseil d’administration de l’Associa‐ tion québécoise de la pro‐ duction d'énergie renouve‐ lable (AQPER), Daniel Gi‐ guère, a notamment pris la parole.
L’industrie est inquiète. Elle est inquiète parce qu’il y a beaucoup de producteurs indépendants qui, depuis une vingtaine d’années, ont développé la filière éolienne et ont fait de cette ressource ce qu’elle est devenue au‐ jourd’hui, a lancé Daniel Gi‐ guère.
Daniel Giguère a aussi de‐ mandé au représentant d’Hy‐ dro-Québec si les promo‐ teurs privés seraient de nou‐ veau partenaires avec la so‐ ciété d'État dans les futurs parcs éoliens.
Il y a une zone qui n’est pas claire. Pourriez-vous nous rassurer là-dessus? Et aussi, on se demande, oui, il y aura de grands projets éo‐ liens de plus de 1000 méga‐ watts, mais quelle sera la place des producteurs indé‐ pendants? Est-ce qu’on sera seulement consultés comme une ressource spécialisée dans le domaine ou comme de véritables partenaires?, a ajouté Daniel Giguère.
Sans offrir beaucoup de détails spécifiques sur la place exacte qu’envisage la société pour les promoteurs privés, le représentant d’Hy‐ dro-Québec s’est montré ras‐ surant.
Hydro-Québec, on est un monopole, mais on n'a pas le monopole des bonnes idées. Donc, de commencer à trai‐ ter des partenaires privés comme des ressources, on se priverait de beaucoup de sa‐ voir informel et d’opportuni‐ tés de créer de la richesse ensemble, a affirmé Mathieu Johnson.
Pour sa part, le maire de Matane, Eddy Métivier, a tenté d’en savoir plus sur la place qu’aurait le contenu québécois dans les projets d’éolien, alors que les usines de Marmen et Enercon ont fermé leurs portes et que l’usine LM Wind Power à Gaspé a perdu d’importants contrats ces derniers mois.
Quelle est la sensibilité d’Hydro-Québec à s’assurer qu’il y ait un contenu local? On a de grands fabricants ici, au Québec, et j’ai perdu 200 emplois à Matane, a lancé Eddy Métivier, se disant aussi conscient de l’importance de la compétitivité et de la ren‐ tabilité des projets.
C’est une très grande pré‐ occupation, a indiqué Ma‐ thieu Johnson, qui a semblé miser sur l’importance de fa‐ voriser les chaînes d’approvi‐ sionnement locales.
Pour nous, d’avoir des chaînes d’approvisionnement locales, ça n’a pas que des bénéfices d’un point de vue "emplois", ça a aussi des bé‐ néfices au plan géopolitique. Avec toutes les perturbations des chaînes d’approvisionne‐ ment qu’on a connues avec la guerre en Ukraine et la pan‐ démie, ça nous a mis les yeux devant les trous sur la fragilité des chaînes d’appro‐ visionnement à l’échelle mondiale et c’est une ques‐ tion de sécurité énergétique, a indiqué Mathieu Johnson.
Des éléments de ré‐ ponse... et plus de ques‐ tions
Malgré les questions tou‐ jours en suspend, après la rencontre, quelques interve‐ nants ont déclaré qu’ils avaient trouvé des éléments de réponse dans l’allocution du représentant d’HydroQuébec.
Je pense qu’il reste encore des questionnements, mais je pense que le message au‐ jourd’hui était rassurant sur la présence de l’ensemble des acteurs de l’industrie pour la suite des choses et le développement des grands projets comme Hydro-Qué‐ bec, a exprimé Jean-François Thériault, directeur-général de l’Alliance de l'énergie de l'Est.
Pour l’alliance, c’est sur que le développement de l’Est passe par le développe‐ ment d'infrastructures de transport électrique, donc le fait qu’Hydro-Québec re‐ garde des projets structu‐ rants, pour nous, va en lien avec le développement de la ressource et c’est un mes‐ sage qui est intéressant.
Pour sa part, Luiz Calzado, président et directeur géné‐ ral de l’Association québé‐ coise de la production d’éner‐ gie renouvelable, a été satis‐ fait d’entendre que le proces‐ sus serait compétitif pour les projets de plus de 1000 mé‐ gawatts.
Il y a eu quelques clarifica‐ tions sur la compétitivité des grands projets, mais pour le timeline de quand ces projets vont être déployés ou quand ça va être fait, il y a encore du travail à faire du côté d’Hydro-Québec, a men‐ tionné Luiz Calzado.
Pour sa part, le maire de Matane attend de voir ce qu'amènera l'avenir.
On verra avec le temps, ça ne m'a pas nécessairement satisfait. Pour Matane, les 200 emplois, c’est perdu, mais on espère quand même que Marmen va pouvoir re‐ trouver sa place au soleil au niveau éolien parce que l’in‐ frastructure est là et l’usine est là.