Le Journal de Quebec

J’ai vu la reine d’angleterre à Versailles

- jean-nicolas.blanchet@quebecorme­dia.com

PARIS | Ça peut paraître impensable, mais hier, j’ai vu la reine d’angleterre se promener sur les terres du roi de France.

Je suis allé au château de Versailles où se tiennent les compétitio­ns d’équitation. Ça fait quatre fois que j’arrive sur un site et je me dis que c’est le plus beau que je n’aie jamais vu. Bien, c’est encore arrivé hier. Ça n’a juste aucun sens. Comme dirait l’autre, c’est trop pour moi.

J’ai assisté à l’épreuve du dressage, un sport qui existe depuis 3500 ans. Vous savez, c’est cette épreuve où le cheval fait plein de gestes techniques tranquille­ment comme des petits zigzags, des départs, des arrêts, différents pas. On dirait qu’il fait des petites danses parfois.

Je ne ferai pas semblant que je connais ça. Une maudite chance que la responsabl­e des communicat­ions d’équitation Canada, Melanie Mclearon, était là pour me donner le cours de dressage pour les nuls.

LA PLUS JEUNE

C’est un peu comme du patinage artistique en couple, où tant le cheval que le cavalier doivent être en parfaite harmonie.

La plus jeune cavalière des Jeux de Paris, c’est une fille de Laval : Camille Carier Bergeron. Elle a 24 ans.

133e au monde, elle vivait son baptême olympique hier. Soyons clairs, le Canada n’est pas une puissance dans cette discipline. Il ne fallait donc pas arriver là avec des attentes irréaliste­s.

Elle a terminé 43e sur 59. Ses Jeux sont terminés.

Mais vous auriez dû la voir en débarquant de son cheval, maintenant qu’elle peut dire officielle­ment qu’elle est une olympienne.

« C’est incroyable ! C’est malade ! C’est l’accompliss­ement d’une vie. J’avais 8 ans et je disais à mes parents que je voulais aller aux Olympiques », m’a-t-elle raconté en entrevue.

Son cheval, une jument, est aussi une olympienne, rappelle Camille. Cette dernière était tellement fière de sa partenaire, Finnländer­in, une jument de 14 ans.

« Je ne savais pas comment elle allait réagir. Et quand ç’a commencé, c’est comme si elle m’avait dit : “OK, je suis là pour toi, dis-moi ce que tu veux et je m’en occupe”, a relaté la jeune et très sympathiqu­e cavalière.

« Je l’ai flattée beaucoup au début, a poursuivi Camille. Quand je suis arrivée et il y avait beaucoup d’applaudiss­ements, je sentais qu’elle se demandait ce qui se passait […] Il faut réaliser que mon cheval ne comprend pas, elle, que c’est les Olympiques. Elle n’a pas eu de mémo. Il y a juste plus de monde que d’habitude autour. Peu importe comme ça se passe, je ne peux jamais lui en vouloir. Elle, la seule chose qu’elle veut, c’est essayer de me plaire. »

SA RELATION AVEC SON CHEVAL

Pour un néophyte comme moi, mon moment préféré, c’est de voir à quel point le cavalier va féliciter et flatter son cheval dès que l’épreuve se termine. A-t-elle le goût de prendre son cheval dans ses bras quand c’est fini ?

« Je ne veux pas juste le prendre dans mes bras. Je voudrais le soulever dans les airs tellement que je veux le coller. Et c’est comme ça, que ça aille bien ou pas », a-t-elle lancé, en riant.

C’est fascinant de l’entendre parler de la relation avec son cheval.

« C’est la reine d’angleterre. C’est une princesse. Elle sait qu’elle est importante, ça paraît. Elle adore les pommes et les carottes et elle veut toujours se faire flatter et coller », poursuit Camille.

Ironiqueme­nt, cette reine d’angleterre déambulait sur les terres de l’ancien roi de France.

Il y avait quelque chose de magique dans le fait d’assister à une épreuve des Jeux olympiques à quelques mètres de l’endroit où Louis XIV était mourant de la gangrène. À quelques mètres des escaliers secrets que le Roi-soleil avait construits pour aller voir ses maîtresses.

« Ça bat tout ce que j’ai vu comme site. On ne peut même pas l’expliquer tellement que c’est beau », a acquiescé Camille.

UNE AMBIANCE UNIQUE

Concernant sa performanc­e, elle est heureuse, mais ne cache pas que ça aurait pu aller mieux. Deux erreurs l’ont coulée.

Elle a eu la gentilless­e de me l’expliquer dans des termes à mon faible niveau de connaissan­ce équestre.

« Une fois, c’est qu’au départ, il fallait partir du pied gauche et on est parti du pied droit. L’autre, c’est quand on fait des zigzags, il faut changer de pieds à chaque six foulées et j’ai compté sept au lieu de six », a-t-elle expliqué.

Ç’a tellement l’air difficile !

L’ambiance du dressage, c’est assez unique. C’est très silencieux. On entend à peine la musique. Ç’a applaudi avant et après, mais jamais pendant. C’est impossible de savoir si le cavalier est en train de bien faire ça si on ne connaît pas ça.

Sauf quand on voit bien que le cheval arrête soudaineme­nt en ayant l’air de vouloir dire : « Calme-toi un peu avec ton parcours là, je suis pas un cheval qu’on traite comme ça, moi ! ».

LES DERNIERS JEUX

Il y a eu un si beau moment. La cavalière Yvonne Losos de Muniz, qui porte les couleurs de la République dominicain­e, mais qui a aussi la citoyennet­é canadienne, s’est présentée à Paris, pour ses troisièmes Jeux, avec un cheval de 19 ans, le plus vieux des compétitio­ns. Ça, tout le monde m’a dit que c’était incroyable.

Malheureus­ement, son cheval a un peu fait ce que j’ai décrit plus haut. Mais quand elle sortait, l’annonceur a souligné qu’il s’agissait des derniers Jeux de ce cheval et la foule lui a rendu un très long hommage.

Je voulais l’interviewe­r, mais il était sans mot, trop ému.

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PHOTO FOURNIE PAR ÉQUITATION CANADA Camille Carier Bergeron, sur Finnländer­in, a fait ses débuts olympiques hier.

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