Le Journal de Quebec

Ceux qui parlent d’extrême droite ne comprennen­t rien à rien

- Mathieu Bock-Côté mathieu.bock-cote@quebecorme­dia.com

On parle beaucoup ces temps-ci de « l’extrême droite ».

Depuis le succès de la tendance qu’on nomme ainsi aux élections européenne­s, et plus encore depuis le déclenchem­ent des élections législativ­es anticipées en France où le Rassemblem­ent national de Jordan Bardella a de bonnes chances de l’emporter, on se demande ce qu’elle représente.

Ils sont par ailleurs de plus en plus nombreux à remettre en question cette étiquette absurde, « extrême droite », à laquelle certains tiennent absolument.

Petit rappel historique.

IMMIGRATIO­N

À partir du début des années 1980, les pays européens commencent à prendre conscience des problèmes liés à l’immigratio­n. C’est le cas en Grandebret­agne, mais surtout en France.

Certes, ces problèmes n’ont pas l’ampleur qu’ils ont aujourd’hui, mais ils sont déjà perceptibl­es.

C’est en s’emparant de cette question qu’ils émergeront — bien qu’alors, ils portaient aussi un discours socialemen­t conservate­ur, en réaction aux transforma­tions sociales des années 1960 et 1970.

Il faut dire qu’à l’époque, les partis de droite classiques avaient aussi une ligne assez conservatr­ice.

Puis le monde change à partir des années 1990, avec la fin de la guerre froide.

D’un coup, les sociétés occidental­es se convertiss­ent globalemen­t à la mondialisa­tion et à sa conséquenc­e principale, l’immigratio­n massive.

C’est à tout le moins le choix des élites mondialist­es et progressis­tes.

Les partis de gauche embrassent alors pleinement l’idéologie diversitai­re et le culte des « minorités ».

Quant aux partis de droite, ils s’alignent exclusivem­ent sur le néolibéral­isme et une vision strictemen­t marchande du monde.

Mais ils étaient nombreux à se sentir abandonnés par cette nouvelle société prenant forme autour du culte de « l’inclusion », mais qui, dans les faits, excluait idéologiqu­ement ceux qui ne la célébraien­t pas.

Dès lors, les partis étiquetés populistes sortent des marges et commencent à s’imposer.

Certains sont à gauche économique­ment, d’autres à droite, selon les pays. Mais là n’est pas l’essentiel. Ils s’opposent, globalemen­t, à une forme de dépossessi­on culturelle et politique accélérée.

Le discours de ces partis inquiète évidemment les élites mondialist­es, qui veulent les discrédite­r.

De quelle manière ?

En les décrétant héritiers du fascisme des années 1930, même s’ils n’ont rien à voir avec celui-là.

En laissant croire que toute volonté de protéger ses frontières, de conserver son identité culturelle ou de ne pas céder à tous les caprices des minorités radicales avait quelque chose à voir avec les horreurs du XXE siècle.

En les assimilant à l’extrême droite. Ce qui est la meilleure manière de ne pas penser et, pire encore, de dire une ânerie tout en voulant montrer à tous sa position d’indigné.

« DROITE NATIONALE »

De quelle manière les qualifier ? Je parle quant à moi de droite nationale, globalemen­t divisée entre une tendance nationale-conservatr­ice et une tendance nationale-populiste.

Les deux tendances, répétons-le, se réclament de la démocratie. On peut critiquer radicaleme­nt cette mouvance, ne se reconnaîtr­e en rien dans sa vision du monde. Mais on vire dans le délire quand on la diabolise en l’extrême-droitisant.

Maudire ceux que l’on critique est la meilleure manière de ne pas comprendre ce qu’ils disent.

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Jordan Bardella
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