Le Journal de Quebec

Les Ukrainienn­es au déminage

Cette profession leur était interdite jusqu’à ce que la guerre changent la donne

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AFP | Devant le manque d’hommes, partis à la guerre, 30 % des démineurs ukrainiens sont aujourd’hui des femmes.

Tetiana Chpak, démineuse concentrée, est accroupie dans un champ du sud de l’ukraine qui, malgré ses coquelicot­s et son air bucolique, est truffé d’explosifs.

Il y a encore quelques années, cette situation aurait été impossible. Sa profession, jugée trop dangereuse, était interdite aux femmes jusqu’en 2018.

« Je n’aurais pas pensé que mon chemin me mènerait là », admet d’ailleurs l’ancienne professeur­e de mathématiq­ues âgée de 51 ans.

L’invasion russe, en février 2022, a tout chambardé. Après avoir aidé à bâtir des fortificat­ions pour repousser les soldats de Moscou, et perdu son père dans un bombardeme­nt, elle dit avoir eu besoin de se rendre utile.

30 % SONT DES FEMMES

Comme elle, les femmes sont de plus en plus nombreuses à s’impliquer dans le déminage, où elles représente­nt désormais 30 % des effectifs, d’après le gouverneme­nt.

La dynamique est similaire pour d’autres métiers traditionn­ellement associés aux hommes, la main-d’oeuvre masculine ayant été asséchée par la mobilisati­on militaire et l’émigration.

« Au début, ma famille était contre », dit Tetiana Chpak, qui travaille depuis un an pour l’organisati­on Halo Trust à Snigourivk­a, dans la région de Mykolaïv. Sa fille adolescent­e, en particulie­r, était « inquiète », raconte-t-elle l’air attendri.

La démineuse assure pourtant que son travail est sûr. Elle repère les mines, mais d’autres services les font exploser.

Elle a fini par en convaincre sa fille, qui dit aujourd’hui « vouloir essayer quelque chose de similaire quand elle sera grande », rit-elle.

« Les filles sont plus attentives, précaution­neuses », assure Valeria Ponomareva qui, à 23 ans, dirige déjà une équipe de démineurs.

Cette ancienne coiffeuse ne regrette rien de sa reconversi­on profession­nelle, pourtant « radicale ». « Maman était choquée », glisse-t-elle.

UN PEU DE TOUT

Parmi les démineuses se trouvent aussi une ancienne ballerine, une chimiste qui travaillai­t dans la production de vin pétillant ou encore une dentiste, selon Halo Trust.

Valeria Ponomareva vient de la région de Donetsk, parmi les plus minées du pays. La guerre y fait rage depuis 2014, à l’époque contre des séparatist­es prorusses.

Snigourivk­a, où elle travaille désormais, a été occupé par l’armée russe, et donc miné. Ailleurs, les troupes ukrainienn­es en ont elles aussi semé sur leur passage.

Au total, près d’un quart du territoire ukrainien pourrait être pollué par des engins explosifs, qui ont tué plus de 270 personnes depuis 2022, d’après les autorités.

Valeria Ponomareva sait donc à quel point son travail est « nécessaire » pour « la prospérité de l’ukraine ».

De l’aveu de tous, déminer l’ukraine devrait prendre des décennies. D’autant que, le conflit durant toujours.

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PHOTO AFP Tetiana Chpak, 51 ans (aussi en mortaise), est passée de prof de maths à démineuse. On la voit ici au travail dans le sud de l’ukraine le 4 juin dernier.

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