« La vie, tu n’as pas le temps de dire ouf que c’est fini ! »
Dans une émouvante entrevue au Journal, Robert Charlebois, 80 ans, revient sur sa longue carrière
Il vient de franchir le cap des 80 ans et voit, depuis quelques années, ses jeunes et moins jeunes amis artistes le quitter. Robert Charlebois se dit chanceux d’être en santé et d’avoir une passion qui lui permet de continuer à multiplier les projets. « C’est ce qui me garde jeune », a raconté le chanteur, riche d’une carrière de plus de 50 ans.
Figure essentielle de la chanson au Québec, Robert Charlebois a fait paraître plus de 30 albums et offert des milliers de spectacles dans la francophonie. Lauréat de nombreux prix et distinctions (dont le prix du Gouverneur général du Canada pour les arts de la scène, le Félix Hommage de l’ADISQ pour l’ensemble de son oeuvre et l’insigne de Commandeur de l’Ordre des Arts et des Lettres en France), il a fait partie de plusieurs spectacles historiques, dont 1fois5 (avec Jean-Pierre Ferland, Claude Léveillée, Yvon Deschamps et Gilles Vigneault) et J’ai vu le loup, le renard, le lion avec ses amis Félix Leclerc et Gilles Vigneault il y a cinquante ans.
CÉLÉBRER LES CHANTEURS VIVANTS
« La vie, tu n’as pas le temps de dire ouf que c’est fini ! Il faut apprécier les trésors qui sont vivants, dire aux artistes qu’on les aime pendant qu’ils sont vivants », dit-il en évoquant des amis comme Claude Dubois et Gilles Vigneault qui sont toujours bien de ce monde.
« J’ai beaucoup d’amis qui sont partis, dont Jean-Pierre Ferland, qui laisse une grande oeuvre derrière lui. Les dernières fois que je l’ai vu, il avait perdu de son humour punk et baveux ; je voyais qu’il n’était plus le même. J’ai beaucoup ri avec lui. C’était un poète qui avait une très belle plume ».
L’ULTIME SPECTACLE DES COWBOYS FRINGANTS
Plus récemment, il y a eu l’émouvant ultime spectacle des Cowboys Fringants, avant le décès du chanteur Karl Tremblay. C’est Robert Charlebois qui avait assuré la première partie. « Ce n’était pas un show, c’était un événement et une véritable cérémonie », confie l’artiste en un souffle. « Chaque fois que je vais sur les Plaines, j’ai de vraies et intenses émotions. C’est là que tout a commencé, en fait », poursuit-il.
LA PASSION QUI REMPLACE LE TRAVAIL
« Quand on a la chance d’avoir une passion dans la vie, quelle qu’elle soit, on dirait que le mot “travail” sort de notre vocabulaire », lance-t-il. Voilà pourquoi l’auteur-compositeur-interprète n’a éprouvé que du bonheur lors de l’enregistrement du spectacle Plaines de chansons le 26 juillet dernier à Québec.
« Il y avait une foule extraordinaire sur les Plaines. J’ai fait de petits bouts des Gens de mon pays avec tout le monde, mais je ne veux pas en dire plus pour garder la surprise [rires]… On a eu beaucoup de plaisir à se retrouver et à faire cela entre copains, notamment avec mon ami Claude Dubois », explique l’artiste qui avait fait partie de la toute première SuperFrancoFête… en 1974 !
LA GRANDE CLASSE DE CÉLINE
L’interprète chantera – seul au piano sur un bateau voguant sur la Seine – dans le cadre des Jeux paralympiques de Paris le 29 août prochain. Il a évidemment visionné le grand retour de Céline Dion lors de la cérémonie d’ouverture des Jeux olympiques. « J’étais sur les Plaines à Québec avec les artistes en répétition et j’ai retrouvé ma femme qui était en larmes. J’ai regardé sa prestation et c’était la grande classe, élégant, sans forcer. Ça a fait l’unanimité ! Il s’agit aussi de la plus belle chanson jamais écrite.
Quel bel hommage à Édith Piaf ! »
UN SACRÉ DÉFI
Les 22, 23 et 24 août prochains, l’artiste montera sur la scène de la Maison symphonique en compagnie des 88 musiciens, des choeurs et des percussionnistes de l’Orchestre symphonique de Montréal pour présenter le grand spectacle Charlebois symphonique. « C’est comme une apothéose, un climax. Quand j’écoute ces arrangements majestueux, je me dis que les réalisateurs comme Denis Villeneuve ou même Federico Fellini seraient jaloux. C’est un travail beaucoup plus intense que je le pensais, c’est un sacré défi. Je vais faire replonger les gens 50 ans en arrière et on ne fera pas dans la demi-mesure. Je me sens comme un athlète sans harnais de sécurité ! »