La défense accuse la victime d’avoir inventé le viol
Le médecin spécialiste accusé d’un viol en groupe estime être victime d’une jeune artiste qui aurait « inventé » un « mensonge » pour ne pas faire de la peine à son copain de l’époque, bien qu’il s’agisse d’un stéréotype révolu dans le système de justice canadien selon la Couronne.
« La présomption d’invention, c’est un mythe, il n’y a même pas ici de début de preuve que [la victime] ait inventé de toute pièce son histoire », a plaidé Me Delphine Mauger de la poursuite, hier au palais de justice de Montréal.
La procureure répliquait à l’avocate de Stephan Probst, qui tente d’être acquitté par tous les moyens d’un viol collectif qui serait survenu à l’été 2020 dans son luxueux penthouse du Vieux-Montréal.
À l’époque, la plaignante dont l’identité est protégée par la cour voulait « expérimenter » sexuellement avec une femme. Elle avait rencontré en ligne Wendy Devera, qui l’avait invitée chez Probst, alors chef de département à l’Hôpital général juif de Montréal et enseignant à l’Université McGill.
CONSENTEMENT
Mais même si la jeune artiste avait mis au clair qu’elle ne désirait pas avoir de relation avec un homme, Probst avait « espoir qu’elle change d’avis », avait-il lui-même dit à la cour.
Lors de la soirée, le médecin de 46 ans avait tenté un rapprochement dans un spa, mais il s’était fait repousser. Mais après avoir drogué la victime alléguée à la MDMA, il affirme avoir eu un « consentement général » et implicite. C’est là qu’il aurait violé la jeune femme, pendant que son acolyte la retenait.
« Seul un oui veut dire oui, le silence et la passivité ne sont pas du consentement, a rappelé Me Mauger. Qui était en contrôle de la situation ? Qui a donné la drogue ? Qui a décidé de ne pas mettre de condom et qui a décidé qu’elle consentait ? »
Étant donné que la plaignante avait verbalisé son refus auparavant et que Probst ne semble avoir jamais vérifié le consentement, il a donc commis une agression sexuelle, a plaidé la Couronne.
VICTIME PAS PARFAITE
La défense, de son côté, a présenté une tout autre lecture de l’affaire, en se disant « convaincue que [le viol] n’est pas arrivé ».
Me Valérie Riendeau a ainsi décortiqué minutieusement le témoignage de la plaignante, essentiellement pour avancer que comme elle n’avait pas dit exactement la même chose dans ses différentes versions, dont celle donnée alors qu’elle était encore droguée, elle n’était nécessairement « ni fiable ni crédible ».
« Il y a des imprécisions, par exemple l’endroit précis où se trouvaient les vêtements ou si elle s’était changée dans une salle d’eau ou de bain, mais ça n’affecte pas le coeur de son récit », a plaidé Me Jérôme Laflamme de la Couronne déboulonnant le mythe de la victime parfaite.
La juge Suzanne Costom rendra sa décision vers la fin de l’été.