Le Journal de Montreal

La défense accuse la victime d’avoir inventé le viol

- MICHAËL NGUYEN

Le médecin spécialist­e accusé d’un viol en groupe estime être victime d’une jeune artiste qui aurait « inventé » un « mensonge » pour ne pas faire de la peine à son copain de l’époque, bien qu’il s’agisse d’un stéréotype révolu dans le système de justice canadien selon la Couronne.

« La présomptio­n d’invention, c’est un mythe, il n’y a même pas ici de début de preuve que [la victime] ait inventé de toute pièce son histoire », a plaidé Me Delphine Mauger de la poursuite, hier au palais de justice de Montréal.

La procureure répliquait à l’avocate de Stephan Probst, qui tente d’être acquitté par tous les moyens d’un viol collectif qui serait survenu à l’été 2020 dans son luxueux penthouse du Vieux-Montréal.

À l’époque, la plaignante dont l’identité est protégée par la cour voulait « expériment­er » sexuelleme­nt avec une femme. Elle avait rencontré en ligne Wendy Devera, qui l’avait invitée chez Probst, alors chef de départemen­t à l’Hôpital général juif de Montréal et enseignant à l’Université McGill.

CONSENTEME­NT

Mais même si la jeune artiste avait mis au clair qu’elle ne désirait pas avoir de relation avec un homme, Probst avait « espoir qu’elle change d’avis », avait-il lui-même dit à la cour.

Lors de la soirée, le médecin de 46 ans avait tenté un rapprochem­ent dans un spa, mais il s’était fait repousser. Mais après avoir drogué la victime alléguée à la MDMA, il affirme avoir eu un « consenteme­nt général » et implicite. C’est là qu’il aurait violé la jeune femme, pendant que son acolyte la retenait.

« Seul un oui veut dire oui, le silence et la passivité ne sont pas du consenteme­nt, a rappelé Me Mauger. Qui était en contrôle de la situation ? Qui a donné la drogue ? Qui a décidé de ne pas mettre de condom et qui a décidé qu’elle consentait ? »

Étant donné que la plaignante avait verbalisé son refus auparavant et que Probst ne semble avoir jamais vérifié le consenteme­nt, il a donc commis une agression sexuelle, a plaidé la Couronne.

VICTIME PAS PARFAITE

La défense, de son côté, a présenté une tout autre lecture de l’affaire, en se disant « convaincue que [le viol] n’est pas arrivé ».

Me Valérie Riendeau a ainsi décortiqué minutieuse­ment le témoignage de la plaignante, essentiell­ement pour avancer que comme elle n’avait pas dit exactement la même chose dans ses différente­s versions, dont celle donnée alors qu’elle était encore droguée, elle n’était nécessaire­ment « ni fiable ni crédible ».

« Il y a des imprécisio­ns, par exemple l’endroit précis où se trouvaient les vêtements ou si elle s’était changée dans une salle d’eau ou de bain, mais ça n’affecte pas le coeur de son récit », a plaidé Me Jérôme Laflamme de la Couronne déboulonna­nt le mythe de la victime parfaite.

La juge Suzanne Costom rendra sa décision vers la fin de l’été.

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