Des groupes environnementaux menacés de perdre leur financement de la province
Des groupes néo-brunswickois voués à l’assainissement et la protection de l’environnement se montrent inquiets face à l’épuisement des ressources du Fonds en fiducie pour l’environnement (FFE), d’où provient une part importante de leur financement.
C’est le cas de Jolyne Hébert, qui dirige l’équipe de l’Association du bassin versant de la baie de Shediac. L’organisme oeuvre notamment pour assainir les eaux, lutter contre l’érosion, protéger l’écosystème et éduquer la population au sujet d’enjeux liés à leur environnement.
«Ce serait probablement la réalité pour tous les groupes de bassins versants et la majorité des groupes environnementaux de la province.»
UN PROGRAMME DÉSUET, MAIS SANS REMPLACEMENT
Le FFE était alimenté par une part de la consignation des contenants de boissons, comme prévu dans Loi sur les récipients à boisson. La législation a été abrogée le 1er avril 2024.
C’est à ce même moment que de nouvelles dispositions sur la gestion des déchets dans la Loi sur l’assainissement de l’environnement sont entrées en vigueur. L’application d’un modèle de responsabilité élargie des producteurs a vu Encorp Atlantique être chargée de gérer les contenants de boissons, et leur valeur consignée est maintenant entièrement remise aux clients, alors qu’ils n’en recevaient que 50% avant ces changements.
L’autre moitié ainsi que des montants non réclamés servaient à financer le Fonds en fiducie pour l’environnement. Il s’agissait en fait de son unique source depuis 2001.
«Le programme de gestion des récipients à boisson, qui date de 30 ans, était considéré comme vieillissant et devant être modernisé pour s’aligner sur les tendances en matière de gestion des déchets», indique l’agent de communications du ministère de l’Environnement et des Gouvernements locaux, Morgan Bell.
Cela dit, Fredericton n’a pas encore identifié de sources de financement alternatives pour le FFE. Il indique toutefois que le fonds possède encore des sommes excédentaires qui pourront être redistribuées aux projets jugés prioritaires pendant que d’autres options de remplacement sont évaluées.
EFFET DOMINO
Bien que le FFE fournisse plus ou moins la moitié du budget de fonctionnement de son association, Mme Hébert souligne que les autres sources de financement dont elle dépend sont souvent octroyées à condition qu’elles ne soient pas seules. C’est ce que l’on appelle des fonds de contrepartie.
«Si on n’a pas ce 50%, on ne sera pas en mesure d’aller chercher des fonds fédéraux non plus.»
En d’autres mots, si le FFE n’offre plus de soutien, ces sources fédérales ne lui seront plus disponibles.
Elle ajoute que contrairement à d’autres provinces, le Nouveau-Brunswick n’offre pas de soutien financier à plus long terme pour permettre aux organismes comme le sien de payer les coûts de base de ses opérations quotidiennes, au lieu de devoir entamer les démarches à chaque projet.
«On essaie de rester positif et d’espérer qu’il ne va pas nous laisser disparaître», confie Mme Hébert en parlant du gouvernement.
Elle souhaite qu’il reconnaisse l’importance de l’apport de son organisme à la société et que cela l’incite à trouver des pistes de solutions viables.
«Si on perd le Fonds en fiducie pour l’environnement, qui est notre revenu de base, on ne pourra pas continuer à exister», laisse-t-elle tomber.
COMMUNICATIONS INSATISFAISANTES POUR LE RÉSEAU ENVIRONNEMENTAL
Le Réseau environnemental du N.-B. (RENB), qui représente une centaine de groupes environnementaux à but non lucratif, déplore le peu d’échanges qui ont eu lieu avec le gouvernement provincial dans le contexte de ces changements. Il estime également que le fonds s’épuisera d’ici 2027 et que l’impact du travail de ses membres en pâtira.
Si le Fonds en fiducie pour l’environnement peut encore offrir du financement au cours des prochaines années, c’est qu’il avait enregistré un excédent accumulé de plus de 40 millions $, tel que rapporté par le vérificateur général en 2022.
«Le manque de surveillance du Fonds en fiducie pour l’environnement ferait en sorte que l’Assemblée législative et le public seraient insuffisamment informés pour déterminer si le mandat du Fonds est réalisé», pouvait-on lire dans le rapport.
Nat Goguen, qui est coordinateurice des programmes de Biodiversité et des Bassins versants du RENB, indique avoir assisté à deux rencontres en octobre 2023 et durant l’hiver qui a suivi.
«Nous avons eu de belles présentations à propos des projets du gouvernement, mais personne n’a pu répondre à nos questions ou préoccupations à propos des changements au Fonds en fiducie pour l’environnement.»
Autrement, iel affirme que son organisme est demeuré sans réponses à plusieurs reprises, après avoir envoyé des requêtes par courriel ou par téléphone.
«Le manque de communication et de consultation ainsi que les décisions unilatérales prises depuis la fin de l’année dernière ont certainement rendu la vie des groupes de bassins versants beaucoup plus difficile et notre avenir plus incertain», ajoute le président du caucus de bassins versants du RENB, Colin Forsythe.
«Je m’inquiète pour le FFE NB et son avenir qui semble plutôt sombre et je veux essayer d’assurer le soutien de ce programme à l’automne, alors que nous nous dirigerons vers les élections.» ■