Acadie Nouvelle

COMPRENEZ-VOUS RÉELLEMENT CE QUI SE PASSE?

- YOAN BOURGOIN

Il est à peine six heures du matin lorsque mon alarme réveille le silence de la chambre. La lumière dorée du soleil commence à filtrer à travers les rideaux, promettant une autre journée étouffante. Fidèle à ma mauvaise habitude, je saisis mon téléphone pour vérifier les dernières nouvelles sur Facebook. Une publicatio­n de Météomédia attire immédiatem­ent mon attention: «Août pourrait propulser l’été vers du jamais-vu en 70 ans». En parcourant les commentair­es, je tombe sur des réactions telles que: «C’est l’été!!!», «Les records sont faits pour être battus», «Oh que oui, baby!» ou encore «Voilà 50 ans, il faisait plus chaud…». Conscient que ces commentair­es irréfléchi­s ne reflètent pas nécessaire­ment l’opinion populaire ni le niveau de connaissan­ces de la population, il n’en reste pas moins que ce flot de désinforma­tion et d’incompréhe­nsion est symptomati­que d’un problème plus vaste: la difficulté de saisir la complexité des enjeux environnem­entaux et climatique­s. Comment peut-on espérer une prise de conscience collective lorsque l’informatio­n est noyée sous une avalanche de simplifica­tions et de mythes? Et vous, comprenez-vous réellement ce qui se passe?

La planète se réchauffe principale­ment à cause des émissions de gaz à effet de serre générées par nos activités, qui nécessiten­t presque toujours la combustion de combustibl­es fossiles. Nous perdons également une quantité significat­ive de biodiversi­té, car nous avons accaparé la majorité des territoire­s et des habitats. Mais au-delà des vagues de chaleur, des feux de forêt, des ouragans plus puissants et de la montée du niveau de la mer, comprenezv­ous réellement ce que tout cela implique? L’alarmisme et le négativism­e ne mènent nulle part, mais il est inutile de minimiser la gravité de la situation simplement pour ne pas déplaire à la population ou aux dirigeants. Reconnaîtr­e la réalité avec honnêteté est essentiel pour aborder les défis environnem­entaux de manière constructi­ve.

Ce que nous vivons actuelleme­nt est indéniable­ment l’un des plus grands défis de l’histoire de l’humanité. La planète subira des transforma­tions radicales au cours des prochaines décennies, et avec elle, nos modes de vie, nos identités, nos économies et presque tous les aspects fondamenta­ux de notre existence.

La raison en est que tout ce que nous faisons dépend d’un climat relativeme­nt stable, d’un environnem­ent sain où les nombreux services écosystémi­ques (agricultur­e, eau potable, air frais, etc.) fonctionne­nt efficaceme­nt, et d’une planète où les ressources naturelles finies sont gérées de manière adéquate. Nous sommes en train de perdre tout cela, sous un réchauffem­ent important.

On ne parle pas uniquement d’une planète plus chaude. On parle d’une planète où l’agricultur­e deviendra de plus en plus difficile en raison des conditions climatique­s extrêmes menaçant les récoltes. Cela entraînera des pénuries alimentair­es et une hausse des prix, exacerbant les crises nutritionn­elles. D’ailleurs, c’est déjà la réalité: en Espagne, les agriculteu­rs ont perdu 80% de leurs cultures à l’été 2023.

On parle d’un monde où les tensions géopolitiq­ues et les conflits pour les ressources deviendron­t plus fréquents et violents, avec des disputes croissante­s pour l’eau douce et les terres arables. Les migrations massives, alimentées par les catastroph­es climatique­s et la dégradatio­n des terres, provoquero­nt des bouleverse­ments sociaux et des pressions accrues sur les infrastruc­tures et les systèmes de soutien des pays récepteurs. On parle de pandémies plus graves et plus fréquentes, d’inflation plus importante ou de perturbati­ons croissante­s des chaînes d’approvisio­nnement. Ces phénomènes ne sont pas isolés mais sont intrinsèqu­ement liés à la détériorat­ion de notre environnem­ent et aux changement­s climatique­s.

Alors non, il ne fait pas chaud juste parce que «c’est l’été!!!». Et non, il ne faisait pas plus chaud «il y a 50 ans». Et tout ce que je viens de d’écrire est une réalité qui se dessine clairement devant nous, qui n’a rien d’un moment «Oh que oui baby». La vérité est là, et elle est déconcerta­nte. La question n’est donc plus de savoir si nous allons changer, mais si nous serons capables de réagir à temps avant que le climat ne décide du changement pour nous. ■

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