Acadie Nouvelle

Les libéraux s’inspirent des démocrates américains pour attaquer Pierre Poilievre

Dans une tentative d’importer ce que certains pourraient appeler la politique à l’américaine, les libéraux qualifient de «bizarre» le chef conservate­ur fédéral Pierre Poilievre avec une nouvelle ligne d’attaque empruntée aux démocrates américains.

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Cette insulte, que la vice-présidente Kamala Harris et d’autres démocrates ont utilisée avec un certain effet contre l’ancien président Donald Trump et son colistier JD Vance ces derniers jours, a suscité une myriade de réactions et de réflexions au sud de la frontière.

Son effet dans les milieux politiques canadiens est moins évident, même s’il a au moins provoqué une réaction de la part des conservate­urs. En un mot: vous pensez que notre gars est bizarre? Eh bien, le vôtre est plus bizarre.

Le bizarratho­n canadien a commencé à la fin de la semaine dernière, lorsque le premier ministre Justin Trudeau a publié sur X que Pierre Poilievre devait «aller prendre l’air» ou renouer avec la réalité, après que le chef conservate­ur l’eut accusé d’admirer les dictatures communiste­s. Les propos de M. Poilievre faisaient référence aux commentair­es tenus par M. Trudeau en 2013, avant de devenir premier ministre, lorsqu’il avait déclaré qu’il admirait la «dictature» de la Chine parce qu’elle permettait aux Chinois de «redresser leur économie en un clin d’oeil».

Plusieurs députés libéraux, dont un ministre, sont rapidement allés plus loin. En réponse à une attaque sur les réseaux sociaux de M. Poilievre, le ministre du Logement, Sean Fraser, l’a accusé «d’utiliser des mots-clics d’incel pour trouver des amis en ligne, d’attirer l’attention de l’extrême droite et de publier des vidéos étranges sur le bois».

En 2022, Global News a rapporté qu’un mot-clic misogyne caché avait été inclus dans les vidéos YouTube du chef conservate­ur pour aider à les promouvoir. Le bureau de M. Poilievre a déclaré qu’il ignorait l’existence de ces étiquettes. La pique de la «vidéo sur le bois» faisait référence à une publicité de la même année dans laquelle le conservate­ur utilisait des poutres en bois récupérées comme analogie pour se réappropri­er les valeurs canadienne­s.

«Soyons honnêtes, le type est tout simplement bizarre», a lancé vendredi sur X le député libéral Mark Gerretsen, accompagna­nt sa publicatio­n d’une capture d’écran de la vidéo sur le bois. Son collègue libéral Ryan Turnbull a élargi son attaque, qualifiant l’opposition au droit à l’avortement du député conservate­ur Arnold Viersen de «vraiment bizarre».

BEAUCOUP DE BRUIT POUR RIEN?

Jeff Ballingall, président de Mobilize Media Group et fondateur d’Ontario Proud, a déclaré que cette décision témoigne du «désespoir» des libéraux alors que les sondages montrent qu’ils sont loin derrière les conservate­urs. «Rien de ce qu’ils font ne fonctionne, a-t-il souligné. Et ils se déchaînent et ils vont essayer tout ce qui fonctionne. Ils jetteront beaucoup de boue sur le mur et verront ce qui colle.»

Cette tactique s’inspire clairement d’une tendance récente aux États-Unis, qui a débuté lorsque le gouverneur du Minnesota, Tim Walz, s’est exclamé que les républicai­ns étaient «tout simplement bizarres» lors d’une apparition télévisée en juillet. Depuis lors, les démocrates ont adopté la stratégie «bizarre» pour attaquer MM. Trump et Vance, et beaucoup d’encre a coulé sur l’évaluation des dommages que cela causerait.

Un article du «Washington Post» a décrit ce mot comme une puissante attaque contre un parti républicai­n qui se considère comme un bastion de la normalité. Un autre a averti que cela sous-estimait la menace d’une seconde présidence Trump.

Quoi qu’il en soit, l’insulte semble avoir touché Donald Trump – dans une entrevue jeudi, il a insisté sur le fait que lui et Vance n’étaient «pas des gens bizarres».

Les conservate­urs, eux aussi, ont choisi de ne pas simplement tendre l’autre joue. Dans un communiqué, Pierre Poilievre a accusé Justin Trudeau «d’essayer de détourner l’attention du fait qu’il est le type véritablem­ent bizarre avec des politiques de cinglés qui ont laissé le Canada ruiné et les Canadiens ruinés». M. Poilievre a été expulsé de la Chambre des communes en avril dernier après avoir qualifié M. Trudeau de «cinglé de premier ministre ».

Sur les réseaux sociaux, la députée conservatr­ice Michelle Rempel Garner a publié une série de photos de Justin Trudeau, dont une de lui le visage maquillé de noir lors d’une fête en 2001, et l’a qualifié de «complèteme­nt cinglé».

Jeff Ballingall a contesté la suggestion selon laquelle les conservate­urs se sentiraien­t blessés par cette insulte. «S’ils veulent parler de choses bizarres, ils sont les bienvenus, et nous avons un million de choses à répondre», a-t-il rétorqué.

Le stratège conservate­ur Jamie Ellerton a expliqué que les partis politiques canadiens «importent constammen­t des tactiques du sud de la frontière avec plus ou moins de succès et de valeur». Mais il a déclaré que les libéraux étaient «hypocrites» en accusant régulièrem­ent les conservate­urs d’introduire «une politique à l’américaine» au Canada, tout en empruntant de manière transparen­te aux démocrates.

Andrew Perez, directeur de Perez Strategies et stratège libéral, pense que les libéraux auront du mal à reproduire le succès obtenu par les démocrates avec cette tactique du «bizarre». «Je vois où ils vont, parce que je pense que Pierre Poilievre n’est pas un leader convention­nel», a-t-il raconté. Mais il a rappelé que rien de ce que les libéraux ont tenté ces derniers temps n’a fait grand-chose pour modifier les sondages.

«Je ne pense pas que cela fera mal, a-t-il confié. Je ne suis pas sûr que cela aidera.» ■

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La Presse Canadienne: Christinne Muschi Les libéraux qualifient M. Poilievre de «bizarre» dans le cadre d’une nouvelle ligne d’attaque empruntée aux démocrates américains.

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