Acadie Nouvelle

Vapoter à l’adolescenc­e n’est pas sans conséquenc­es à long terme

- Devin Ashton-Beaucage devin.ashton-beaucage@acadienouv­elle.com

La consommati­on de nicotine lors de l’adolescenc­e semble augmenter les chances d’anxiété et de dépression à long terme. Une équipe de chercheurs basée en Ontario croit que la substance nuirait au développem­ent du cerveau, notamment en diminuant ses capacités de réception de dopamine.

Le lien entre la consommati­on et les symptômes avait déjà été démontré par des recherches précédente­s. L’équipe de l’Université de Western Ontario cherche spécifique­ment à comprendre les mécanismes du phénomène en étudiants des rats et puis des humains.

«Il y a un réseau de neurones qui semble être le premier affecté par l’exposition à la nicotine. C’est le circuit de la récompense», indique le Dr Jean Théberge en parlant du noyau accumbens, qui reçoit la dopamine.

Celui qui se spécialise en imagerie cérébrale est l’un des six investigat­eurs principaux, dirigés par le Dr Steven R. Laviolette, à être impliqués dans ce projet financé par les Instituts de recherche en santé du Canada.

«Ça nous permet de vivre des petits plaisirs», explique-t-il, indiquant que de petites doses de dopamine peuvent être distribuée­s pour légèrement récompense­r des accompliss­ements relativeme­nt banals du quotidien.

«Ça nous indique qu’on va dans la bonne direction et que l’on devrait persévérer dans un cours d’action qui est susceptibl­e de nous rendre heureux.»

Un adolescent exposé à la nicotine au quotidien multiplie ses chances de développer un circuit endommagé avec des connexions moins fortes. En conséquenc­e, la réception de dopamine risque d’être moins efficace et il serait plus probable qu’il développe des troubles anxieux ou de l’humeur à l’âge adulte.

Les chances triplent, précise le Dr Théberge.

Bien que les adultes ne soient pas à l’abri de ces mêmes impacts, leur cerveau déjà développé est moins vulnérable.

«Durant l’adolescenc­e, on se débarrasse des connexions des réseaux de neurones que l’on avait pendant l’enfance pour renforcer celles qui sont importante­s dans la vie adulte. Une fois l’adolescenc­e passée, les connexions sont pas mal renforcées», explique le professeur de l’Université de Western Ontario.

DES RATS AUX HUMAINS

Au départ, le groupe de chercheurs a étudié le développem­ent des cerveaux de rats adolescent­s. Ces derniers ont été divisés en groupes, dont certains ont été placés dans une boîte pendant une dizaine de minutes, où le contenu d’une cigarette électroniq­ue a été déchargé dans l’air. Diverses concentrat­ions de nicotines ont été utilisées lors de ces expérience­s.

«Les rats se développen­t rapidement. Donc, on est capable d’étudier ce qui se passe pendant leur adolescenc­e et à l’âge adulte relativeme­nt rapidement. On a des résultats très clairs qui nous démontrent que l’exposition à la nicotine durant l’adolescenc­e augmente les chances de développer des symptômes de troubles anxieux et d’anxiété chez les adultes», explique le Dr Théberge en spécifiant que le passage de l’enfance à l’âge adulte ne dure que quelques semaines chez ces rongeurs.

Une diminution de la connectivi­té au niveau du «circuit de la récompense» a pu être observée et les mâles ont été plus affectés que les femelles.

Les chercheurs ont également remarqué que la consommati­on de supplément­s d’acides aminés a pu aider à prévenir les effets néfastes à long terme chez les rats.

Ils tentent maintenant de voir si les mêmes phénomènes peuvent être observés chez les humains.

«On a un lien causal très clair chez les animaux. On utilise le même modèle, mais on n’a pas le même genre de contrôle», note le Dr Théberge.

Contrairem­ent à leurs expérience­s avec les rats, les chercheurs ne peuvent pas imposer une hygiène de vie et un environnem­ent de croissance identiques à tous les spécimens humains étudiés ni en trouver avec le même historique de consommati­on et la même empreinte génétique.

«On essaie quand même de contrôler plusieurs variables, dont l’âge, le sexe, les variables socioécono­miques et les variables génétiques entre autres choses», note le chercheur.

D’autre part, toutes les personnes étudiées sont de jeunes adultes qui ont développé des maladies liées à l’humeur ou à l’anxiété. Cependant, certaines d’entre elles ont été exposées à des niveaux élevés de nicotine durant leur adolescenc­e, alors que les autres l’ont peu été.

Plusieurs autres participan­ts humains devront être recrutés dans le cadre de ce projet de recherche, qui en est à sa première année sur cinq. ■

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